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 Sauvons le Palais de la Découverte !
 Sauvons le Palais de la Découverte !
				
				samedi 7 mars 2009
Depuis un an, la menace se faisait plus pressante. Aujourd’hui, le  
 gouvernement passe à l’exécution de son projet et la Cité des  
 Sciences et de l’Industrie manœuvre pour inclure le Palais de la  
 Découverte dans son organigramme. On tente ainsi de dissoudre « 
 notre Palais » dans une structure dont ni la finalité ni les  
 méthodes ne sont les mêmes, et c’est un lien essentiel entre le  
 public et la science qui est en grand danger.
 La spécificité du Palais, ce qui a fait son succès et plaît tant au  
 public comme aux scientifiques, c’est le contact direct entre les  
 visiteurs et la science. Au Palais, la science n’est cachée ni  
 derrière des écrans d’ordinateurs ni sous des panneaux  
 publicitaires, on manipule des instruments, on participe à des  
 expériences en public où les progrès de la science sont présentés  
 en direct par de jeunes scientifiques dévoués et compétents, on  
 rencontre des chercheurs qui parlent de leurs découvertes récentes.  
 C’est ce lien étroit qui a toujours justifié un statut  
 d’Etablissement Public à caractère Scientifique Culturel et  
 Professionnel (EPCSCP) sous la tutelle du Ministère de  
 l’Enseignement Supérieur et de la Recherche (bien que le  budget  
 dépende, lui, du Ministère de la Culture). C’est grâce à ce statut  
 que de nombreux moniteurs et vacataires y travaillent, qui sont  
 souvent de jeunes doctorants en cours de thèse. Sans cette  
 structure et sans cette tutelle, l’irrigation du Palais par ces  
 jeunes scientifiques deviendrait impossible.
 Rien à voir avec la Cité des Sciences et de l’Industrie, qui est un  
 EPIC, un Etablissement Public à caractère Industriel et Commercial,  
 où les motivations, le style et les personnels sont autres.
 Afin de tenter de sauver le Palais,  deux pétitions récentes ont  
 réuni plus de 60 000 signatures accompagnées de témoignages que  
 l’on peut lire sur les sites
http://www.sauvonslepalaisdeladecouverte.fr/#pagination_signatures et
http://palais-decouverte.eitic.org/index2.php
 et qui sont aussi émouvants qu’éloquents. Combien de vocations  
 scientifiques sont nées au Palais ? Combien d’enfants,  
 d’adolescents, de curieux de tous âges sont venus au Palais  
 découvrir l’Univers, la génétique, des expériences spectaculaires  
 d’électricité, de mécanique, de biologie, de fusion nucléaire,  
 ouvrir les yeux sur leur environnement quotidien ou compter les  
 décimales du nombre Pi, se demander comment fonctionnent nos cinq  
 sens, où en est le réchauffement de notre planète… ?
 Mais comment peut-on justifier la fusion de ce trésor de la culture  
 avec une structure différente ? Le Palais va-t-il mal ? Avec 600  
 000 visiteurs par an, dont 120 000 élèves et étudiants, la  
 fréquentation du Palais est, rapportée à sa surface, comparable à  
 celle de la Cité et supérieure à celle du Louvre. Or la subvention  
 par mètre carré est 4 fois moindre que celles du Muséum National  
 d’Histoire naturelle, du Musée des Arts et Métiers ou de la Cité  
 des Sciences. De plus, les billets sont moins chers et le Palais  
 n’a pas de recettes publicitaires. Et pourtant la foule est  
 toujours présente, bien que les bâtiments aient besoin d’une  
 rénovation générale. (Cette rénovation a été sans cesse retardée et  
 n’est aujourd’hui qu’à peine entamée, à l’occasion de la cession du  
 « salon d’honneur » au Grand Palais voisin).
 Il tourne, notre Palais. En 2008, la fréquentation a augmenté de 50  
 000 visiteurs par rapport à 2007. Depuis sa création en 1937 par  
 Jean Perrin, prix Nobel et ministre du Front Populaire, le Palais  
 n’a jamais perdu ses traditions magnifiques. Il a toujours montré à  
 tous les publics « la science en train de se faire » afin de « 
 sortir la science des laboratoires ». C’est bien pour cela que le  
 public et les scientifiques s’y sentent chez eux.
 Mais pourquoi donc cette fusion qui a tout l’air d’une absorption ?  
 Est-ce pour économiser de l’argent en période de crise ? Il ressort  
 que la fusion elle-même pourrait coûter plus de 6 millions d’Euros  
 et le fonctionnement du nouvel ensemble demander plus de 2 millions  
 d’Euros de plus par an que les deux établissements séparés. Une  
 subvention constante impliquerait donc de réduire l’offre faite au  
 public.
 Est-ce pour mieux coordonner des activités semblables ? D’une part  
 les activités procèdent d’un esprit différent, d’autre part on ne  
 voit pas pourquoi il faudrait imposer un modèle unique. Entre  
 musées, on peut animer des structures de dialogue sans dissoudre  
 les uns dans les autres comme s’il s’agissait d’absorber des  
 entreprises industrielles. Une Réunion des musées scientifiques  
 existe, qu’il suffirait de développer pour favoriser des échanges  
 sans forcer chacun à perdre son identité.
 La question est lancinante : d’où vient donc ce besoin de fusion ?  
 Lors de sa dernière réunion, le Conseil scientifique du Palais de  
 la Découverte a demandé que soit expliqué l’intérêt scientifique,  
 culturel ou simplement économique d’un tel projet. Aucune réponse  
 n’a été donnée. Dans de telles conditions, doit-on croire les  
 rumeurs ? S’agit-il d’une étape vers une fermeture pure et simple  
 qui libérerait un espace convoité par le Grand Palais voisin ?  
 S’agit-il pour quelque membre de cabinet ministériel de construire  
 un grand ensemble à la hauteur de ses ambitions personnelles ?  
 S’agit-il, pour la Cité des Sciences de s’offrir une vitrine au  
 cœur de Paris ?
 L’heure est grave, pour le Palais de la Découverte donc pour  
 l’avenir de la science, à une époque où l’on a tant besoin  
 d’encourager les vocations scientifiques. Nous demandons aux  
 pouvoirs publics de renoncer immédiatement à ce projet de fusion,  
 et de donner au Palais de la Découverte les moyens financiers d’un  
 développement que son succès mérite, aujourd’hui plus que jamais.
Paris, le 6 mars 2009
Sébastien Balibar (CNRS, Ecole Normale Supérieure),
Edouard Brézin (Ecole Normale Supérieure, Académie des Sciences),
 Claude Cohen-Tannoudji (Prix Nobel, Ecole Normale Supérieure,  
 Collège de France, Académie des Sciences),
Gilles Cohen-Tannoudji (CEA),
Françoise Combes (Observatoire de Paris-Meudon, Académie des Sciences)
 Pierre Encrenaz (Observatoire de Paris-Meudon, Université Paris 6,  
 Académie des Sciences),
 Albert Fert (Prix Nobel, Université d’Orsay, Thales, Académie des  
 Sciences)
Marc Fontecave (CEA, Collège de France, Académie des Sciences),
Antoine Georges (CNRS, Ecole Polytechnique, Collège de France),
 Jean Iliopoulos (CNRS, Ecole Normale Supérieure, Académie des  
 Sciences),
François Jacob (Prix Nobel, Institut Pasteur, Académie des Sciences)
Jean Jouzel (Institut Pierre Simon de Laplace, CEA, GIEC)
Jean-Pierre Kahane, (Université d’Orsay, Académie des Sciences),
Denis Le Bihan (CEA, Académie des Sciences),
 Jean-Marie Lehn (Prix Nobel, Collège de France, Académie des  
 Sciences),
 Hervé Le Treut (Ecole Normale Supérieure, Ecole Polytechnique,  
 Académie des Sciences)
Yves Meyer (ENS Cachan, Académie des Sciences),
Philippe Nozières (ILL, Collège de France, Académie des Sciences),
Yves Quéré (Ecole Polytechnique, Académie des Sciences)
David Ruelle (IHES, Académie des Sciences),
Maxime Schwartz (Institut Pasteur, Académie des Sciences).
 Wendelin Werner (Médaille Fields, Université d’Orsay, Ecole Normale  
 Supérieure, Académie des Sciences)
 
 
