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"Université : actions de la semaine, concert pour les Grands Hommes", par Sylvestre Huet, Libéblogs, Sciences², 30 mars 2009

lundi 30 mars 2009, par Elie

Pour lire cet article sur le blog de Sylvestre Huet.

Les universitaires et chercheurs, soutenus par des présidents d’université, poursuivent leur action cette semaine. Cours public, accueil vigoureux des ministres qui inaugurent une médiatèque à la Cité nationale de l’immigration ce matin (11h30) (lire ici une critique de cette initiative) concert de casseroles au Panthéon pour « réveiller les Grands Hommes » à 16h30, manifestations le 2 avril. (Photo Die In à la Sorbonne vendredi, Matthieu Gauchet)

Cette pression continue de s’exercer sur le gouvernement alors qu’une négociation doit s’ouvrir aujourd’hui à 18h sur la recherche entre Valérie Pécresse et les syndicats, à la demande de la ministre. Et que, à la fin de la semaine dernière, des avancées tangibles ont été obtenues sur le statut des universitaires et la réforme de la formation des enseignants, même s’il reste à préciser les détails... dans lesquels, comme chacun sait, gît le Diable. Autrement dit, une situation qui se présente comme un vif encouragement à manifester encore afin d’obtenir le maximum d’un gouvernement sur le reculoir.

Sur la mastérisation, si cela reste à confirmer, il semblerait que le recul de Xavier Darcos sur le contenu des concours devrait être suivi d’un recul de Valérie Pécresse, sur les maquettes, les formations, l’inscription au concours et en première année de master... Il n’y aurait donc plus d’exigence de remontée de maquettes de nouveaux masters cette année, donnant raison à tous ceux qui ont refusé de les transmettre et désavouant ceux qui ont essayé de le faire. Et l’année de préparation au concours donnerait automatiquement équivalence à une première année de master. Ce recul, s’il est confirmé cette semaine, ouvrirait ainsi la voie à une négociation sur le fond : quelle formation, quels concours et quelle articulation entre les deux dans le cadre d’une reconnaissance du niveau master pour les futurs enseignants ? Lire ici l’analyse détaillée de la Coordination nationale formation des enseignants publiée hier qui soulève en particulier le problème des reçus au concours 2010... mais qui n’auraient pas le master en 2011, l’un des multiples exemples démontrant la nécessité de tout reprendre à zéro pour cette réforme, et donc d’en obtenir le retrait. Et en fin de note le texte des Doyens et directeurs d’UFR de Lettres, Langues, Arts, Sciences humaines et sociales.

Ce moment délicat exige aussi la multiplication des contacts entre les ministères et les syndicats engagés dans l’action... ainsi qu’une « intelligence de la situation » de la part des universitaires engagés dans cette action et des structures mises en place par les assemblées générales comme la Coordination nationale des universités. La difficulté - c’est un grand classique de ce genre de conflit - consiste à combiner le maintien d’une pression maximale tout en ajustant la poursuite de l’action en fonction du degré de mobilisation avec la mesure la plus juste de ce qu’il est possible d’obtenir d’un gouvernement certes ébranlé mais pas à terre. Viser trop bas serait rageant, viser trop haut comporte le risque d’une fin de la partie la plus dure du mouvement - la grève des cours pour les universitaires - sans avoir acté les résultats obtenus de manière claire et écrite, et donc de faciliter la tâche d’un gouvernement qui reviendrait dessus par la suite. L’un des critères important d’appréciation sera ce qui sera mis sur la table par Valérie Pécresse sur l’emploi scientifique (chaires d’excellence qui mangent deux postes pour un embauché) et le rôle des organismes de recherche.

De ce point de vue, l’exemple le plus frappant est celui du contrat doctoral. La question à poser est plus de savoir s’il faut mieux négocier l’aménagement du projet de contrat unique de Valérie Pécresse, plutôt que se féliciter d’avoir obtenu son « abandon »... au profit de la situation actuelle qui est pire par bien des aspects. Question qui n’a rien de simple, mais qui ne sera pas résolue par des textes fourre-tout qui réclament l’abrogation de la LOLF (loi organique relative à la loi de finances) au lieu de se concentrer sur des revendications précises, susceptibles d’être engrangées à l’occasion de ce mouvement puissant et inédit.

Parmi les initiatives marquantes du jour, on peut noter le concert « Réveillons les Grands Hommes », organisé à16h30 au Panthéon. Cinq minutes de tumulte... à coups de casseroles. La Ronde infinie des obstinés se poursuit à Paris devant la mairie (lire à ce sujet le reportage de ma consoeur Véronique Soulé dans Libération ce matin, en vente dans tous les kiosques..). Les cours et conférences débats, dans lesu universités ou des lieux publics, se poursuivent, comme à Paris-1, Paris-6 (Jussieu), Mulhouse, Strasbourg...

Un peu partout on organise des envois massifs de lettres et courriels à Nicolas Sarkozy. Il y a des Assemblées générales prévues dans plusieurs universités (Lyon, Aix, Marseille - on a revoté la grève à Saint Jérôme de manière franche, m’indique un correspondant). D’autres informations sur les actions du jour et de la semaine ici.

La mobilisation dans les IUT se poursuit, comme en témoigne cet appel de la Coordination nationale des IUT : Rien n’est réglé, nous sommes toujours loin du compte

Les personnels considèrent que la circulaire annoncée par la ministre n’est que poudre aux yeux et se désolidarisent des négociations de l’ADIUT et de l’UNPIUT.
Pour diverses raisons explicitées dans le communiqué, la CNP-IUT rappelle sa convergence avec la coordination universitaire et continue de réclamer :
- un décret garantissant les missions des IUT qu’ils accomplissent depuis plus de 40 ans dans un cadre de diplômes nationaux.
- le maintien des moyens financiers et du personnel de manière pérenne au-delà de 2010, passant par un fléchage national par le ministère des moyens financiers (DGF, droits d’inscription, contrat d’établissement, taxe d’apprentissage, formation continue) et des postes de personnels BIATOSS et enseignants.
- la mise en place d ?un système de dotation des établissements, pour toutes les composantes de l’Université, basé sur les besoins. et appellent à des démissions collectives pour le 5 mai, à la participation aux manifestations universitaires du JEUDI 2 AVRIL, en y portant particulièrement les revendications des personnels BIATOSS et ITA, à utiliser les conseils d’IUT comme tribune, sous forme de motion mais aussi lors des votes des subventions à l’ADIUT et à l’UNPIUT, et à organiser des coordinations régionales des IUT.

Voici la déclaration du bureau élargi de la Conférence des Doyens et Directeurs d’UFR Lettres, Langues, Arts Sciences Humaines et Sociales :

Déclaration du 28 mars 2009

Face aux réformes universitaires en cours et à une gestion politique irresponsable de la crise qui en résulte et paralyse le fonctionnement de leurs UFR, les Directeurs et Doyens des UFR de Lettres, Langues, Arts Sciences Humaines et Sociales (LLASHS) réaffirment leur opposition aux projets tels qu’ils sont actuellement formulés.

La CDUL considère que la formation des futurs enseignants, enjeu national majeur, implique une responsabilité particulière des Universités, et donc de leurs composantes, UFR et IUFM. Une réforme de cette formation est incompatible avec la précipitation, les logiques de bricolage ou d’improvisation récurrente qui ont présidé aux projets de mastérisation en cours.

La CDUL constate que suite aux modifications et ajustements successifs, la réforme reste inapplicable : même les rares maquettes existantes ne sont plus en adéquation avec les nouvelles informations disponibles ; de nouvelles maquettes ne peuvent être conçues sur une base qui ne répond pas aux exigences d’une vraie formation des enseignants.

Dans ces conditions, la CDUL demande :

- que le projet actuel soit totalement retiré.

- que la procédure de recrutement d’enseignants pour l’année 2010 soit la même que pour l’année 2009 : maintien des épreuves de concours et des préparations actuelles ; maintien des modalités d’entrée dans le métier et de recrutement sans conditions d’inscription ou de validation au niveau Master 1 ou 2 ; maintien du statut de professeur stagiaire en formation à l’issue du concours pour tous les nouveaux enseignants.

- qu’une réflexion nationale, sous la forme d’États-Généraux associant tous les acteurs, soit engagée sans tarder sur la mastérisation de la formation des enseignants, comme formation authentiquement universitaire, dans ses aspects disciplinaires, professionnels et de recherche.

Cette réflexion doit identifier et prendre en compte tous les aspects du métier d’enseignant, en termes de savoirs et de compétences dans la perspective d’une rénovation souhaitable. Celle-ci doit veiller à respecter les principes suivants : a) Garantir la cohérence nationale des formations à partir d’un cahier de charges et de concours nationaux ; b) Faire en sorte que l’articulation entre formation et concours exclue toute possibilité de dérive dans le sens d’une précarisation des enseignants ou d’une dérégulation des recrutements ; c) Veiller à ce que cette mastérisation ne remette pas en cause les offres de formation existantes, en particulier en termes de recherche, et qu’elle valorise la dimension internationale des cursus.

La CDUL reste vigilante sur l’évolution des autres questions à l’origine de la mobilisation actuelle : statuts, emplois, moyens, CNRS et organismes de recherche...