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Fioraso précise ses intentions pour l’université et la recherche - S. Huet, Blog {Sciences2}, 5 septembre 2012

jeudi 6 septembre 2012, par Mariannick

Lu dans la Revue socialiste universitaire…

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La ministre de l’Enseignement supérieur et de la recherche Geneviève Fioraso a accordé une longue interview à La revue socialiste universitaire. Elle y précise sur nombre de points ses analyses et ses intentions. En complément à cette note publiée ce matin où les élus des scientifiques du Cnrs ont présenté leurs positions au Comité de pilotage des Assises de l’ESR, il est donc utile de s’y reporter.

Voici par exemple ses déclarations sur l’état des finances des Universités et le Crédit d’impôt recherche ::

« RSU : Où sont les marges de manœuvre budgétaire ? La possibilité de faire basculer une part importante des crédits ANR vers les laboratoires vous paraît-elle envisageable pour rééquilibrer la politique de financement entre appels d’offres et crédits récurrents ? Que faire vis-à-vis des universités déficitaires ?

GF : Du côté des universités, la situation est la suivante : si rien n’est fait, fin 2013, 50% d’entre elles auront des fonds de roulement insuffisants, non prudentiels, inférieurs à un mois ! Un tiers d’entre elles seront en déficit budgétaire et un quart en déficit pour deux années de suite. Et c’est une tendance qui s’aggrave. Comment résoudre ce problème ? D’abord, en se posant les bonnes questions. Avoir fait ce qu’a fait le ministère précédent, à savoir « l’autonomie », c’est-à-dire en réalité le transfert des personnels et des tâches, sans moyens ni accompagnement, c’est de l’irresponsabilité totale. N’importe quelle entreprise aurait déposé le bilan si on lui avait fait subir un tel processus ! Et puis cette politique a mis les gens en difficulté, voire en souffrance, sous pression. Du coup, des embauches se sont effectuées dans l’urgence, pour assumer ces nouvelles tâches, par exemple pour faire de l’ingénierie de projets, ce qui a grevé encore plus les budgets. Sans compter que, dans le même temps, on a aussi lancé les plans campus, les investissements d’avenir… Les équipes ont eu du coup moins de temps pour se consacrer à d’autres activités, et en particulier elles ont eu moins de temps pour répondre aux appels d’offres européens. Ainsi, nous sommes passés de 18% de réussite à 11,4% dans le dernier PCRDT [Programme cadre de rechercher et de développement technologique]. Voilà encore un exemple de la baisse des moyens consécutive à la politique de nos prédécesseurs !

On ne peut pas demander aux universitaires et aux chercheurs de tout faire en même temps. Ce ne sont pas des magiciens. C’est pourquoi il faut commencer par accompagner les acteurs, et prendre le temps. Dès mon arrivée au ministère, on a réagit d’abord en mettant en place un système d’indicateurs permettant de nous signaler les tendances aux déficits, la baisse des fonds propres. Et puis, on a dépêché immédiatement nos services sur place, pour aller à la rencontre des universités dans le rouge, afin d’en comprendre les causes. Actuellement, notre travail consiste à analyser précisément les situations, au cas par cas. Un service de 800 personnes, des inspecteurs, peuvent aider à cela au ministère. Rien ne sert de mettre sous tutelle des rectorats, comme cela a été fait par le gouvernement sortant. Il faut garder l’impulsion et l’encadrement du ministère.

Et puis il faut mutualiser l’ingénierie de projets. Nous avons à notre disposition toutes les compétences nécessaires, notamment par le biais d’organismes qui sont habitués à faire ce travail. Plutôt que de conclure des mariages improbables, de rajouter des strates aux strates sans se soucier des cohérences d’ensemble, par pur souci d’effets d’annonce, il faut par conséquent mutualiser les compétences entre les organismes et les universités, afin de faire monter notre système public en compétences, et non pas de le siphonner au service d’improbables entités juridiques privées.

Quant aux marges de manœuvres, elles sont bien maigres en période crise. Mais elles existent. Il va falloir redéployer effectivement les crédits de l’ANR vers les crédits récurrents des laboratoires. Il faut protéger nos laboratoires, en particulier dans la recherche fondamentale, et ne pas embêter les chercheurs en permanence par des courses permanentes aux crédits. Ce n’est pas à l’ANR de définir une stratégie, c’est aux organismes de recherche. L’ANR doit être une agence de moyens, pas de programmation à la place des autres, un outil commun. Et puis il faut encadrer les chercheurs, les accompagner, pour inciter à aller davantage vers l’Europe.

RSU : N’y aurait-il pas également quelques marges de manœuvre à trouver via le Crédit impôt recherche ? Créé par la gauche en 1983 pour soutenir la recherche, en particulier la recherche industrielle, il a été détourné de son objectif initial qui était de soutenir l’effort de recherche des PME. Nombre de rapports – y compris le rapport du député UMP Gilles Carrez en 2009 – ont montré qu’il avait surtout bénéficié aux grands groupes sous-traitant leur R&D, très coûteux pour l’État – à hauteur de 4,7 milliards en 2009. Une réforme du CIR est-elle envisagée ?

GF : Le Crédit impôt recherche peut représenter un levier d’action pour plusieurs ministères. Le sénateur Michel Berson a remis en juillet un rapport consacré au CIR. Je vais le regarder de près. Je pense que ce sera dans le collectif budgétaire 2014, même si je souhaiterais que ce soit dans celui de 2013. L’idée générale, c’est qu’on peut retrouver des marges de manœuvre en le maintenant à son niveau actuel mais en arrêtant les effets d’aubaine pour certains grands groupes avec un redéploiement vers les PME. Et quand il y a un partenariat des PMI/PME avec des grands groupes, il faut que ce soit les sous-traitants qui bénéficient du CIR. Il s’agira de faire aussi sortir du dispositif les services financiers sans valeur ajoutée qui s’y étaient glissés.

La suite ici, en particulier sur le devenir des IDEX, LABEX et autres EQUIPEX, le plan Campus ou la précarité dans les laboratoires.