Warning: Illegal string offset 'format_dest' in /home/clients/a1e31efb9d27af72e25ac786c8fcf5f1/web/ecrire/inc/filtres_images_lib_mini.php on line 928

Warning: Illegal string offset 'format_source' in /home/clients/a1e31efb9d27af72e25ac786c8fcf5f1/web/ecrire/inc/filtres_images_lib_mini.php on line 931

Warning: Illegal string offset 'format_dest' in /home/clients/a1e31efb9d27af72e25ac786c8fcf5f1/web/ecrire/inc/filtres_images_lib_mini.php on line 928

Warning: Illegal string offset 'format_source' in /home/clients/a1e31efb9d27af72e25ac786c8fcf5f1/web/ecrire/inc/filtres_images_lib_mini.php on line 931

Warning: Illegal string offset 'format_dest' in /home/clients/a1e31efb9d27af72e25ac786c8fcf5f1/web/ecrire/inc/filtres_images_lib_mini.php on line 928

Warning: Illegal string offset 'format_source' in /home/clients/a1e31efb9d27af72e25ac786c8fcf5f1/web/ecrire/inc/filtres_images_lib_mini.php on line 931

Warning: Illegal string offset 'format_dest' in /home/clients/a1e31efb9d27af72e25ac786c8fcf5f1/web/ecrire/inc/filtres_images_lib_mini.php on line 928

Warning: Illegal string offset 'format_source' in /home/clients/a1e31efb9d27af72e25ac786c8fcf5f1/web/ecrire/inc/filtres_images_lib_mini.php on line 931
Crédit d’impôt recherche : la gabegie - Sylvestre Huet, blog Sciences², (...) - Sauvons l'Université !

Accueil > Revue de presse > Blogs > Crédit d’impôt recherche : la gabegie - Sylvestre Huet, blog Sciences², (...)

Crédit d’impôt recherche : la gabegie - Sylvestre Huet, blog Sciences², Libération, 18 septembre 2013

jeudi 19 septembre 2013, par Elisabeth Báthory

Le rapport de la Cour des Comptes montre l’inefficacité du CIR (qui relève davantage de l’optimisation fiscale que du soutien à la recherche) et la sous-estimation spectaculaire des dépenses fiscales : entre 5,5 et 6,2 milliards de non-rentrées fiscales prévues en 2014... l’équivalent du budget 2013 cumulé de tous les organismes de recherche publics !

Le rapport de la Cour des Comptes sur le crédit d’impôt recherche confirme amplement les critiques de sa réforme par Nicolas Sarkozy et Valérie Pécresse. Il pose surtout de graves questions sur la véracité des éléments donnés par le gouvernement aux Députés et Sénateurs qui ont voté cette réforme. Au delà de ce rapport, une enquête parlementaire s’impose.

Tout d’abord, la Cour établit la facture - en termes de non-rentrées fiscales. La réforme sarkozyste du CIR créé en 1983 a fait exploser le compteur. Son effet continue d’augmenter car l’entreprise bénéficie de ce CIR jusqu’à quatre ans après l’année de déclaration. Du coup, explique la Cour : « du fait des mécanismes qui permettent aux entreprises de reporter durant quatre exercices leur droit à crédit d’impôt et de la mise en oeuvre du plan de relance (2009-2010), le niveau de la dépense fiscale incluse dans la première partie des lois de finances est bien plus faible. En 2013, un ressaut de 1,05 Md€ a été intégré dans le budget de l’État. En 2014, un ajustement d’une ampleur plus importante sera nécessaire : il devra être d’au moins 2 Md€, correspondant à une dépense fiscale d’au moins 5,3 Md€. La dynamique du CIR devrait se poursuivre par la suite pour converger rapidement vers 6 Md€, puis 7 Md€. »

Sept milliards de dépenses fiscales

Vous avez bien lu : 7 milliards de non-rentrées fiscales à terme ! En 2014, elles seraient entre 5,5 et 6,2 milliards. En comparaison, le budget versé par le ministère de la recherche aux organismes de recherche publics (Cnrs, Inserm, CEA, Inra, Inria, IRD, Ifremer...) est inférieur à 6 milliards dans la loi de finance de 2013. C’est le résultat, écrit la Cour, « d’une réforme majeure aux conséquences mal anticipées. » Ah bon, nos ministres et les énarques de Bercy ne sont pas capables d’anticiper les conséquences d’une réforme fiscale ? Ils sont si mauvais que cela en calcul ?

En réalité, la cause de cet apparent amateurisme n’a rien d’une incapacité technique. C’est la volonté politique qui a aveuglé l’Etat sur les conséquences de cette réforme. Et la justification en était d’un espoir de création d’activité économique par l’innovation privée. Le tout pensé et exprimé sous une forme totalement idéologique, dépourvue d’une rationalité économique démontrée et dénuée du moindre esprit critique sur l’utilité sociale des innovations ainsi récompensée de deniers publics.

Eric Woerth et Valérie Pécresse ont-ils menti aux Députés ?

Le rapport de la Cour révèle ainsi que les "administrations centrales" - en clair les hauts fonctionnaires du ministère de la recherche et de Bercy - avaient plaidé pour une réforme plus mesurée, cherchant à éviter les effets d’aubaine et les contournements par les grands groupes industriels et de services. L’aveuglement de l’Etat devant sa propre réforme fiscale a donc bien relevé d’un ordre du pouvoir politique - directement de Nicolas Sarkozy et soutenu par Valérie Pécresse. Cet épisode montre que le discours sur le manque de pouvoir des politiques ou sur une France qui serait gouvernée par les hauts fonctionnaires et non par les élus est une fable. Lorsque les responsables politiques veulent vraiment quelque chose, ils l’imposent sans mal aux administrations. Et lorsqu’ils se retranchent derrière elles, c’est qu’ils ne veulent pas assumer leur politique.

Le rapport soulève toutefois une question précise : les "sous-estimations" monstrueuses des non-rentrées fiscales du CIR réformé, dans les documents soumis par Bercy aux Parlementaires depuis 2008, sont-elles le résultat d’initiatives des fonctionnaires du Trésor accompagnant la volonté politique exprimée où directement d’ordres donnés par le pouvoir politique de mentir aux députés et sénateurs ? Le rapport note, au total et au fur et à mesure que les années passent, une sous-estimation de plus de trois milliards des non-rentrées fiscales de 2010 à 2012. Ces chiffres bidons qui sous-estimaient de plusieurs milliards les non-rentrées fiscales prévues ont-ils été trafiqués dès leur fabrication ou après avoir constaté que les calculs honnêtes n’étaient pas présentables à l’Assemblée Nationale ? Le rapport cite, page 23, une note de la direction du Trésor du 29 octobre 2007 qui anticipe l’effet réel de la réforme et « faisait état de chiffrages encore supérieurs, qui se sont révélés globalement concordants avec la réalité ». La question qui se pose et qui semble mériter une enquête parlementaire est celle-ci : les ministres chargés du budget et de la recherche de l’époque, Eric Woerth et Valérie Pécresse ont-il eu connaissance de cette note et ont-il délibérément menti aux Députés et Sénateurs en leur présentant un tableau de non-rentrées fiscales prévues différent de celui qui sortait des calculs de la Direction du Trésor ?

L’efficacité du dispositif en question

Qui a profité de cet envol du CIR ? Valérie Pécresse parlait beaucoup de PME pour justifier ce crédit d’impôt. En réalité, note le rapport, si les entreprises de moins de 250 salariés constituent 88% des déclarants, elles ne représentent que 35% du montant total du CIR. Si les PME ont eu une part du gateau, l’essentiel de son augmentation provoquée par la réforme sarkozyste a profité aux grands groupes.

Devant un tel coût, se pose la question de l’efficacité de ce dispositif, le plus généreux du monde, précise la Cour. Son objectif officiel est de favoriser l’augmentation des dépenses de R&D privée. Est-ce le cas ? Et surtout en proportion de l’effort fiscal consenti ? Le rapport apporte des réponses, propose des pistes permettant d’éviter les fraudes les plus évidentes, mais aussi le détournement massif, mais légal, consistant à remonter au niveau des groupes le crédit d’impôt recherche et ainsi de le découpler complètement de l’effort de recherche conduit par les filiales.

Dans son résumé, la Cour livre une appréciation pour le moins prudente de l’efficacité du CIR : « L’évolution qu’a connue la dépense intérieure de recherche et développement des entreprises n’est pas à ce jour en proportion de l’avantage fiscal accordé aux entreprises. » Elle regrette qu’il n’existe guère d’études académiques sur l’efficacité du CIR depuis sa réforme en 2008. Et ajoute, page 72 :« Au vu des données désormais disponibles qui portent la créance de CIR à 5,2 Md€ en 2011, soit 0,25 point de PIB, on peut s’interroger sur le score qu’accorderait aujourd’hui le comité d’évaluation des dépenses fiscales et des niches sociales au CIR, le caractère raisonnable du coût de la mesure au regard de son efficacité faisant partie des critères retenus pour établir ce score. » Mais cette prudence est bien loin du constat brutal que les chiffres imposent. Même s’il s’agit d’un indicateur grossier et piloté par d’autres paramètres, il suffit d’observer la part du PIB consacrée à la recherche - stagnante - pour conclure contre la réforme sarkozyste. Un regard précis sur les actions de recherche conduites par tel ou tel grand groupe permet aussi de conclure à l’échec général de cette dépense fiscale massive. On pourra toujours trouver tel ou tel dirigeant d’entreprise pour prétendre que telle activité a été maintenue, non délocalisée ou créée grâce au CIR, il s’agit là d’un discours officiel, contredit dès que les propos sont privés et off. La piste la plus intéressante de réflexion donnée par la Cour consiste à pointer la différence de structure de notre économie et surtout de notre industrie avec l’Allemagne. Nos groupes industriels ont un effort de recherche plutôt bon. Mais le problème posé par nos PME industrielles n’est pas qu’elles seraient récalcitrantes à cet effort... c’est qu’elles n’existent pas. Et ce n’est pas une politique de type CIR qui peut les faire exister.

Les grands groupes se sont gavés de CIR

La Cour des Comptes écrit aussi page 58 : « En 2011, près de 19 700 entreprises ont déposé une demande de crédit d’impôt en faveur de la recherche, soit 0,5 % des entreprises en France30. Le montant des dépenses déclarées a atteint 18,4 Md€, et génère un crédit d’impôt de 5,17 Md€, correspondant à un taux moyen de crédit d’impôt de 28,1 %. Cette situation est très éloignée de celle de 2007 : le CIR concernait moins de 10 000 entreprises, dont les 15,4 Md€ de dépenses déclarées généraient une créance de 1,81 Md€ (soit un taux de crédit d’impôt de 11,8 %). »

Il n’est guère besoin d’un doctorat en fiscalité pour conclure. Pour les PME il y a eu un effet d’aubaine massif qui, pour certaines d’entre elles a contribué fortement à conforter ou créer un effort de recherche. Pour les entreprises de plus de 5000 salariés, l’effet d’aubaine encore plus massif est probablement totalement découplé de l’effort de recherche et relève de l’optimisation fiscale pure. Entre 2007 et 2011 le CIR des PME de moins de 250 salariés à augmenté de 40%... contre 130% pour les entreprises de plus de 5.000 salariés ! Il est d’ailleurs significatif de constater que la part des industries manufacturières ne représente plus que 64% du total des dépenses de R&D déclarées. Contre 34% pour les services... et, parmi ces dernières, 11% pour les sociétés de conseil et d’assistance en informatique. Pire : les banques et assurances ont par exemple obtenu 90 millions de crédits d’impôt sur leur dépenses de 2011.

Par Sylvestre Huet, le 18 septembre 2013

A lire sur le site des blogs de Libération