Accueil > Mystique du management > L’ANR recale 90% des projets scientifiques (suite) : la science n’est pas à (...)

L’ANR recale 90% des projets scientifiques (suite) : la science n’est pas à la fête. Jean-François Trans et Emmanuel Micron, 1er septembre 2014

lundi 1er septembre 2014, par Hélène

L’ANR a recalé 90% des projets scientifiques, enfin 91.5% pour être exact.

Suivant en cela les méthodes clamées (il s’agit de rhétorique pas de réalisation ...) par les brillants néo-manageurs qui nous gouvernent, on pourrait introduire dans ce magnifique processus d’évaluation, la question du "coût complet d’un tel processus".

En effet, compte tenu du nombre de dossiers soumis, du nombre moyen de chercheurs ayant pris part à la soumission de ces dossiers, du nombre moyen d’heures passés par ces chercheurs et de leurs salaires horaires moyens combien coûte à la Nation cette plaisanterie en comparaison des sommes allouées à quelques uns ?

Il faudrait encore compter les réunions d’experts, le temps (c’est aussi de l’argent) passé à évaluer, etc ...

Pour autant, cette approche purement comptable, ne prendrait encore pas en compte, le temps, l’énergie et l’énervement que les chercheurs dépensent pour se battre contre les dysfonctionnements de l’ANR. Temps et énergie qu’ils ne dépenseront pas dans le travail pour lequel ils sont payés : la recherche scientifique et non la recherche d’argent.

Lors de cette dernière vague de soumission des projets à l’ANR, les dysfonctionnements ont été particulièrement nombreux et particulièrement frustrants pour les chercheurs qui tentaient de soumettre un projet. Ainsi, le serveur sur lequel doivent être déposés les projets a été inaccessible durant 13 jours, juste avant la date limite (mais ce n’est qu’un détail mineur ...). Les ingénieurs dépendants d’une officine sous traitante (néo-management oblige) en charge des différents problèmes techniques furent aux abonnés absents durant toute la période des ponts de mai, qui précédait la soumission. Nombre d’ informations en ligne sur le site de l’ANR étaient contradictoires avec celles fournies dans les versions papiers. Pour couronner l’ensemble, l’agence s’est tout d’abord avérée injoignable avant de fournir des conseils pour le moins farfelus. Ainsi, contrairement à ce que qu’ont affirmé divers personnels de l’ANR, il est faux de dire qu’un projet peut être géré financièrement par un seul pôle. En fait le diable est dans les détails : il y a une ambiguïté sur la distinction partenaires/pôles financiers, distinction qui a bougé entre 2013 et 2014 (sans être corrigée sur le site de dépôt ...). Il faut dire que si les gestionnaires de l’ANR sont sympathiques et de bonne volonté, ils sont malheureusement assez ignorants du fonctionnement de leur propre organisme (usine à gaz où le service X ignore souvent tout de ce que fait le service Y, pourtant en charge du même dossier). Il faut dire qu’une grande partie des personnels est sous contrats précaires et que de nombreux postes vacants ne sont toujours pas pourvus...

Note finale d’humour administratif : les personnes ayant tenté de soumettre des dossiers qui ont au final été rejetés du fait de ces dysfonctionnements, ont reçu des courriers signées par un (sic ...) """Directeur de la Performance, de l’Amélioration et des Processus""" qui explique que tout est très clair, et qu’il n’y a qu’à savoir lire ... le guide des déposants.

Citations du jour :

Hâtons nous d’en rire avant que d’en pleurer. (Beaumarchais, Le Barbier de Séville,I, 2. )

Ce qui est bon pour la banque Rotschild est bon pour pour la recherche française. (Emmanuel Micron*)


*Oui on sait, c’est petit.