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Année réduite à… 20 semaines - Pierre Dubois, Histoires d’Universités, 9 juin 2015

samedi 13 juin 2015, par Mr Croche

Les enseignants-chercheurs n’en finissent pas de subir les évolutions du calendrier universitaire. Pour autant, ce calendrier n’est pas centré sur les intérêts des étudiants (volume et qualité des savoirs transmis, facilitation des apprentissages, progression des taux de réussite en licence).

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Comment en est-on venu à une année universitaire réduite à 20 semaines de cours, partagée en deux semestres de 12 semaines (dont deux semaines de contrôle continu au sein de chaque semestre), et prolongée par une session de rattrapage avant les vacances d’été ?

Session de rattrapage.

L’arrêté du 1 août 2011, dit arrêté Wauquier, ne l’a pas supprimée. En janvier 2014, l’UNEF, partisane du maintien de cette session, a gagné son recours devant le tribunal de Strasbourg (elle dénonce le chantage des présidents d’université et les appelle à plus de responsabilité pour faire réussir les étudiants). En mai 2015, l’université de Strasbourg n’a pas réussi à faire annuler ce jugement par la Cour administrative d’appel de Nancy : la requête de l’université de Strasbourg est rejetée. Elle versera une somme de 1 000 (mille) euros à l’UNEF et une somme d’un même montant à l’AGE-UNEF au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative. Rattrapage en droit du 29 juin au 11 juillet 2015 : communiqué de l’Amicale de Droit.

Université de Strasbourg, second semestre 2014-2015 (début des cours le 15 janvier) : mes frustrations d‘auditeur libre, inscrit en 1ère année de licence. Bilan de 3 cours magistraux, suivis en continu de 9 à 12 heures (3 enseignants différents, chacun faisant une heure de cours). Volume horaire théorique : 12 semaines x 3 cours x 1 heure = 36 heures.

Volume horaire réel ? Il faut d’abord retrancher 6 heures (2 séances pour le contrôle continu intégral) : il reste 30 heures. Il faut ensuite soustraire deux pauses officieuses de près de 10 minutes après le 1er et 2ème cours : au final, restent moins de 27 heures réelles, soit 9 heures de cours par matière d’enseignement. Autant dire que le contenu de chaque cours a été loin de celui annoncé dans le guide des études.

Mais le plus agaçant pour moi furent
1. un calendrier des cours interrompu par deux contrôles continus, par une semaine de vacances en février, par des absences planifiées ou non de tel ou tel enseignant en début ou en cours de semestre.
2. Un savoir limité, débité en petites tranches, mémorisé le temps d’un contrôle continu. C’est ça, les conditions d’études universitaires aujourd’hui ? Et, de plus, la tristesse d’une université désertée dès fin avril par les étudiants qui ont réussi les soit-disant examens. Ils semblent s’en satisfaire : acquérir le plus de crédits ECTS possibles dans le moins de temps possible !

Mais pourquoi les enseignants ont-ils accepté, pourquoi acceptent-ils une telle dégradation des conditions temporelles de l’exercice de leur métier ? Pourquoi, par exemple, les enseignants de l’université d’Angers n’ont-ils pas protesté contre une offre d’emploi publiée récemment, une offre avec un service d’enseignement insupportable et qui signe l’arrêt de mort du métier d’enseignant-chercheur ?

Repères historiques.

Le statut des enseignants-chercheurs prévoit, depuis 1983, un service d’enseignement – en présence des étudiants – de 128 heures de cours magistral (ou 192 heures équivalent TD), soit un service de 4 heures de cours magistral par semaine durant 32 semaines (ou 6 heures de TD). Les universités n’ont jamais été capables d’organiser ces 32 semaines de cours (chronique du 20 août 2010, 10 mois de cours : impossible !). La semestrialisation a réduit le nombre de semaines de cours, une période d’examens séparant les deux semestres.

Aujourd’hui, la plupart des universités affichent des calendriers sur 12 ou 13 semaines de cours par semestre : dans les faits, c’est faux, et sans doute pas seulement à Strasbourg ! Par ailleurs, le contrôle continu intégral rompt le rythme des cours. Le maintien de la session de rattrapage, défendue vents et marées par l’UNEF, empêche d’avoir une année universitaire digne de ce nom.
Et la valeur de la licence aujourd’hui ?