Accueil > Revue de presse > Vœux d’affectation sur Parcoursup : les lycéens n’ont même pas peur de la (...)

Vœux d’affectation sur Parcoursup : les lycéens n’ont même pas peur de la sélection ! - Gurvan Le Guellec, L’Obs, 15 mai 2018

mercredi 16 mai 2018, par Elie

"L’Obs" a eu accès aux vœux d’affectation dans le supérieur enregistrés par les élèves de terminale. Résultat : un plébiscite pour les filières les plus sélectives.

Est-ce la même jeunesse ? Alors que la protestation étudiante contre la loi Vidal continue à perturber la vie des campus, les lycéens – premiers concernés par la réforme – restent docilement à leur pupitre, attendant que les facs et la plateforme Parcoursup répondent à leurs vœux d’affectation.

Pourtant, la sélection à l’entrée de la fac est devenue une réalité tangible. En droit, en psychologie, en Staps (sport), en Paces (médecine et études de santés) – les quatre filières de l’université française où la demande excède le plus souvent les capacités d’accueil, mais également en biologie, en éco-gestion ou en informatique, les facultés sont bien en train de classer les candidats selon leur mérite afin de ne pas recourir au tirage au sort. Et, jusqu’à présent, les lycéens n’ont rien trouvé à y redire.

Pragmatisme

Les étudiants – et enseignants – contestataires soulignent que ces derniers sont encore jeunes et influençables, et qu’à partir du 22 mai, quand les réponses – et surtout l’absence de réponses – des universités les plaçant sur liste d’attente vont commencer à tomber, la révolte qui couve va finir par exploser. Mais une autre analyse est possible.

Nous sommes allés voir comment l’équilibre offre-demande – autrement dit le marché du supérieur – a été reconfiguré par Parcoursup. L’examen des vœux fac par fac, formation par formation, est un exercice complexe. La comparaison, avec la session 2017 notamment, est soumise à de nombreux biais méthodologiques. Les lycéens pouvaient faire 24 vœux d’affectation, ils n’en font plus que 10. Ces vœux étaient hiérarchisés, ils ne le sont plus…

Reste qu’un scanning exhaustif des données fait apparaître quelques constantes. Il en ressort notamment que, par ses choix d’orientation, le lycéen de 2018 fait preuve d’un pragmatisme très marqué. Filières professionnalisantes, sélectives : l’université à laquelle il aspire est assez éloignée du modèle "humaniste" – ouvert à tous, centré sur les savoirs – que défendent les détracteurs de la loi Vidal. Peut-être n’est-ce qu’un choix de raison. Mais force est de constater que jusqu’à présent les lycéens font bien le jeu du gouvernement.

IUT, BTS, prépas : les lycéens optent pour la sélection

C’est une des plus grandes surprises de Parcoursup. Depuis des années, les filières sélectives – BTS, IUT, prépas et écoles post-bac – augmentent sans cesse leur part de marché, au point de recruter aujourd’hui plus de la moitié des néo-bacheliers. Mais cette année 2018 est exceptionnelle. Le nombre de candidats ayant émis au moins un vœu en IUT, en BTS et en prépa, a augmenté respectivement de 25,9%, de 15,5% et de 11,7%, et les formations sélectives concentrent à elles seules les deux tiers des vœux.

Ce tropisme pro-sélection concerne tous les lycéens, indépendamment du bac qu’ils passeront à la fin de l’année. Le nombre de vœux émis par des bacs pros en BTS augmente ainsi de 26,7% et le nombre de vœux émis par des bacs technos en IUT de 40,5%.

Comment expliquer ce boom ? Peut-être par la mise en place de quotas de boursiers (chaque formation devra intégrer dans ses effectifs le même pourcentage de boursiers qu’elle en compte parmi ses candidats), qui fait le jeu des lycéens fragiles et moyens d’origine populaire. Ou tout simplement par l’efficacité du discours gouvernemental.

Emmanuel Macron avait expliqué cet été que "tout le monde n’était pas fait pour aller à l’université". La très prudente Frédérique Vidal n’est jamais allée aussi loin, mais elle n’a eu de cesse de plaider pour une présence accrue des bacs technos en IUT et des bacs pros en BTS. Enfin, tout récemment, Edouard Philippe, "sur la base des vœux des candidats" a promis d’"accompagner les établissements pour créer des places supplémentaires là où il en faut", notamment en BTS et IUT.

Reste à passer de la parole aux actes, et à débloquer les budgets nécessaires, la prise en charge d’un étudiant dans ces filières étant bien plus coûteuse qu’en licence générale. Les lycéens pros et technos ont beau être peu mobilisés politiquement, ils sont suffisamment grands pour se souvenir durablement des promesses qui leur ont été faites.

Droit, Staps, Paces : autocensure dans les filières en tension

Lire la suite sur le site de L’Obs.