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"Censures canadiennes", Stéphane Foucart, Le Monde, 9 novembre 2013.

jeudi 14 novembre 2013

Même la revue Nature n’en a fait qu’une brève de seize lignes et c’est probablement là un autre signe du trouble de notre époque. Car les résultats de l’enquête menée par l’Institut professionnel de la fonction publique du Canada (IPFPC) et publiée ces jours-ci auraient dû, dans un monde normal, provoquer la franche indignation des revues savantes.
Pourquoi ? Parce que l’enquête de l’IPFPC suggère que près de la moitié (48 %) des scientifiques fédéraux canadiens – travaillant dans les agences de sécurité sanitaire, les organismes publics, etc. – ont été témoins de situations dans lesquelles des données scientifiques ont été délibérément soustraites de documents officiels, donnant « une information incomplète, inexacte ou trompeuse au public, à l’industrie, aux médias ou aux représentants du gouvernement ».
La moitié des quelque quatre mille répondants disent disposer d’exemples d’ingérences politiques dans leur travail, à même de compromettre la santé ou l’environnement des Canadiens. Près de 90 % des chercheurs interrogés estiment qu’ils ne peuvent s’exprimer publiquement pour faire part de leurs préoccupations sur les sujets relevant de leur compétence professionnelle. Il s’agit, généralement, d’affaires liées à l’environnement, à la gestion des ressources naturelles, à la santé publique.

Ce n’est pas une exception
On aurait tort de voir dans la situation canadienne une sorte d’exception. D’autres grandes démocraties occidentales sont installées dans de telles dérives.
En Australie, le discours gouvernemental sur le réchauffement est à l’exact inverse de celui des scientifiques : qu’à cela ne tienne, le gouvernement conservateur de Tony Abbott est engagé dans le méthodique démantèlement des institutions chargées de travailler sur le climat (Le Monde du 15 octobre)...
Aux Etats-Unis, l’ère Bush avait vu une insidieuse censure s’exercer sur les climatologues de la NASA. La situation actuelle n’est guère plus brillante. A l’été 2012, la direction de la Food and Drug Administration – l’agence américaine chargée de la sécurité alimentaire et pharmaceutique – admettait avoir espionné plusieurs de ses scientifiques... Il serait intéressant qu’une vaste enquête, semblable à celle menée en juin au Canada, soit conduite en France.

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