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Les fichiers du scandale d’Acadomia - Chloé Durand-Parenti , Le Point.fr, 27 mai 2010

vendredi 28 mai 2010

C’est un sévère avertissement que la Commission nationale informatique et libertés (Cnil) a adressé à la société Acadomia, leader du soutien scolaire en France, le 22 avril dernier. Une sanction qui a été rendue publique jeudi matin sur le site de l’institution , à la suite d’un rapport confidentiel de la Cnil, dévoilé par Le Parisien/Aujourd’hui en France , et qui épingle une série de dysfonctionnements graves dans les pratiques de l’entreprise de pédagogie privée. Première infraction, Acadomia a constitué, sans en faire la demande à la Cnil, des fichiers élèves et enseignants, dans lesquels elle compile de nombreuses données sur ces personnes. Le fichage systématique concerne même des candidats au recrutement qu’Acadomia n’a pas retenus ou bien des enseignants qui ont choisi de démissionner. Mais le plus inquiétant est encore ce qui ressort de l’examen de ces fiches par la Cnil.

Détails privés, insultes et accusations sans fondement...

En effet, qu’il s’agisse de celles des enseignants ou de celles des clients - parents et élèves - d’Acadomia, les fiches regorgent d’informations relatives à la vie privée : "père en prison", "a fait de la prison", "est mis en examen (je ne sais pas pourquoi)", "en liberté surveillée pour affaire de pédophilie", "enfant adopté ! Sa mère lui a fait boire de l’alcool étant bébé", " s’est teinte en blonde toute seule et n’importe comment. Elle s’est fait un piercing dans le dos de sa mère". Les fiches font également fréquemment référence à des données confidentielles concernant la santé des personnes : "hospitalisé en urgence pour une tumeur cancéreuse", "la maman a un cancer de l’utérus", "sort de chimio, cancer du poumon diagnostiqué en avril", "en grave dépression suite à une agression (viol)", "alcoolisme des parents", "a fait trois tentatives de suicide". Et les annotations ne s’arrêtent pas là...

Certains commentaires portés sur les fiches franchissent allègrement la frontière de l’insulte, voire de la diffamation : "seul bémol : il pue", "trop de profs ont déjà défilé chez sa saloperie de gamin", "le père est un gros con, il ne veut pas payer les cours de sa fille", "la mère est une grosse conne", "bref vraiment trop conne pour comprendre", "père pas malin du tout (voire crétin)", "mère salope". Tant et si bien que le rapporteur de la Cnil a chiffré les occurrences des mots conne (212), salope (10), crétin (15) dans les fichiers de la société. En outre sont aussi portées, noir sur blanc, des accusations graves sans fondement vérifié : "attention, problèmes attouchements père !", "s’est fait violer à Pâques par son cousin !", "Mme est raciste, homophobe c’est certain". Autant de faits d’autant plus dommageables que ces données sont conservées aujourd’hui sans limitation de durée. De quoi sérieusement inquiéter les parents décidés à offrir des cours particuliers à leurs chères têtes blondes..
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"Nous pouvons prouver à tout moment ce que nous avançons"

Le président de la Cnil, Alex Türk, a donc décidé de signaler ces infractions au parquet de Paris le 17 mai dernier. "J’ai trouvé que les faits étaient suffisamment graves et caractérisés, maintenant il appartient au procureur de décider s’il souhaite ou non donner des suites pénales à cette affaire", déclare-t-il au point.fr. Pour sa défense, Acadomia avance que le rapport de la Cnil est "truffé d’inexactitudes". "C’est totalement faux", rétorque Alex Türk. D’ailleurs,"nous avons les saisies informatiques de l’ensemble des écrans dans nos archives (...) nous pouvons prouver à tout moment ce que nous avançons", indique-t-il. Le président de la Cnil affirme d’ailleurs que "lorsque les dirigeants de l’entreprise sont venus devant la commission contentieuse de la Cnil pour défendre leur point de vue, accompagnés d’un avocat spécialiste en la matière, jamais il n’y a eu la moindre remarque sur l’exactitude des informations".

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