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Retraites : une loi inégalitaire (pourquoi vos enseignants sont contre la réforme des retraites) - SLU, janvier 2020

vendredi 24 janvier 2020, par par PCS (Puissante Cellule Site !)

2 pages à télécharger et à diffuser ! On l’a même en version poster grâce au collectif de mobilisation de l’UFR Ingénierie de Sorbonne Université !

Le gouvernement présente sa réforme comme un moyen de « sauver notre système de retraites ». Or c’est bien la loi nouvelle qui va le mettre en péril, en fragilisant son financement, tout en organisant une baisse généralisée des pensions et un allongement de la durée de travail.

Une réforme qui n’est pas nécessaire

Selon de nombreux chercheurs, l‘équilibre financier des retraites n’est pas menacé ni à court, ni à moyen terme, grâce en particulier à la vigueur de la démographie française ; les enfants et les salariés en activité sont en réalité assez nombreux pour payer les retraites des retraités et futurs retraités. Dans le système en vigueur aujourd’hui, le financement est assuré en partie par les cotisations des salariés, en partie par celle des entreprises. La part des cotisations patronales, qui a été beaucoup baissée ces dernières années, est la principale responsable du déficit actuel. Ce déficit, présenté par le gouvernement comme une catastrophe inéluctable, est donc le fruit d’un choix : l’équilibre ne serait pas difficile à retrouver.
Le gouvernement dit aussi qu’il est bien normal que le système ne fonctionne plus car nous vivons plus longtemps qu’avant. Or depuis 5 ans l’espérance de vie n’augmente plus pour les femmes, tandis que la progression chez les hommes est très faible.

Il n’y a aucune nécessité à allonger la durée du travail, à abaisser les pensions, ni à transformer de fond en comble un système de retraite qui fonctionne bien.

La retraite par points : vers l’insécurité des pensions

Jusqu’ici : les retraités touchent 75% de leur salaire calculé sur les 6 derniers mois (les fonctionnaires) ou les 25 dernières années (les salariés du privé), une différence fondée sur le fait que les salaires des fonctionnaires sont plus faibles que ceux du privé, à tâches et qualifications égales.
Avec le nouveau système c’est l’ensemble de la carrière qui sert au calcul de la retraite, et plus les 6 derniers mois ou les 25 dernières années – où le salaire est en principe meilleur qu’en début de carrière.
Les personnels de l’éducation (enseignants, personnels administratifs) vont y perdre énormément (les salaires de début de carrière sont bas, et augmentent lentement).
Mais ils ne sont pas les seuls. Dans le nouveau système, les euros cotisés seront transformés en points de retraite. Ces points auront une valeur susceptible de varier selon l’équilibre financier du système. Ainsi la pension de retraite ne sera plus automatiquement reliée au salaire que l’on avait lorsque l’on travaillait.
C’est là une perspective très inquiétante si on la met en rapport avec une autre disposition de la loi, interdisant que le pays consacre plus de 14% de son PIB à verser les pensions. Que se passera-t-il si la part des retraités augmente dans la population totale ? La loi obligera à baisser la valeur du point.
De plus, suivant la conversion entre euro cotisé et points, et entre points et euro de retraite proposée par le gouvernement, les retraites vers 62 ans (l’âge légal actuel de départ à la retraite) seront si faibles qu’elles conduiraient beaucoup de salariés à travailler au delà de cet âge légal. La réforme ne semble spécialement pas favorable, à en croire les spécialistes, aux femmes qui ont des carrières souvent plus courtes et plus hachées que les hommes.

Une inégalité accrue

Le gouvernement dit que la réforme est juste car tout euro cotisé ouvrira aux mêmes droits. C’est négliger un point capital : tous les emplois ne sont pas également pénibles, et l’espérance de vie selon le métier effectué est très inégale. Un ouvrier profite statistiquement moins longtemps de sa retraite qu’un cadre. En minorant le facteur « pénibilité » dans le calcul des pensions, le système nouveau crée de l’inégalité. On voit bien aussi que l’injonction de travailler plus longtemps n’a pas du tout le même sens suivant le métier pratiqué…
Une autre disposition du projet de loi est très critiquée : ceux qui gagnent plus de 10 000 euros mensuels ne toucheront pas de retraite sur leurs revenus au delà de ces 10 0000 euros. Mais sur ces revenus-là, ils ne cotiseront que très peu à la caisse de retraite. Ce qui est présenté par le gouvernement comme une mesure de justice sociale (les riches ne videraient pas les caisses de l’ensemble de la population moins riche) fait peser un risque sur l’équilibre financier du système : car elle signifie que les riches cotiseront beaucoup moins qu’avant, alors qu’il faudra continuer à verser pendant longtemps des pensions élevées aux riches qui auront beaucoup cotisé dans le système actuel.

Jusqu’à l’instauration de la retraite par répartition (le système actuel) au lendemain de la seconde guerre mondiale, les retraités faisaient partie des catégories pauvres de la population. Ce système a permis une augmentation des revenus des personnes âgées ; il est aujourd’hui remis en question.

Les raisons d’une réforme

La réforme permet de justifier et de ne plus voir remettre en question les baisses de cotisation patronales qui ont eu lieu ces dernières années.
La baisse généralisée des pensions aura pour conséquence que les salariés qui le pourront se tourneront vers des assurance-retraites privées. Ces assurances privées, pour l’instant peu développées en France, verront un énorme marché s’ouvrir pour elles. En 2019, pour favoriser leur développement, la loi PACTE propose à ceux qui contractent des assurances privées des déductions d’impôt : des impôts qui pourraient servir à financer le déficit des caisses de retraites…

Pouvoir envisager, pouvoir vivre une retraite sereine est une aspiration essentielle que notre société a plutôt bien garantie ces dernières décennies. C’est cette aspiration fondamentale qui est aujourd’hui remise en cause.

Pour aller plus loin : https://fr.calameo.com/read/002473731006f451c557f