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CPGE partenariales : du pipeau ! - P. Dubois, Educpros,

jeudi 24 janvier 2013

Réforme du 1er cycle dans le projet de loi Fioraso (version du 15 janvier 2013). Seconde modification introduite dans l’article L 612-3 du Code de l’éducation (page 11). “Chaque lycée ayant une classe préparatoire aux grandes écoles conclut une convention avec un ou plusieurs établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel. Cette convention prévoit les conditions dans lesquelles les enseignements sont dispensés aux élèves par chacun des deux établissements et les évaluations sont effectuées”. 64 chroniques du blog sur les Classes préparatoires aux grandes écoles (CPGE).

Les CPGE partenariales existent déjà, mais c’est du pipeau (chronique du 10 juin 2011, suite à la parution de la circulaire de Patrick Hetzel). Il existe également des prépas dans les universités, mais elles connaissent de nombreuses limites (chronique du 14 mars 2011).

J’écrivais en juin 2011 : “Fluidité aussi pour les enseignants ; participation croisée d’enseignants aux différentes formations. De qui se moque-t-on ? Pourquoi les agrégés de classes préparatoires iraient-ils enseigner en licence à des élèves moins “bons” ? Peut-on imaginer que ces agrégés acceptent de gaité de cœur que les enseignants de licence viennent enseigner en CPGE ? En route pour la Ronde des agrégés : ceux des CPGE iraient enseigner en licence, et ceux détachés en université iraient enseigner en prépa. Surréaliste ! Irréaliste. Les CPGE partenariales, c’est du pipeau !“

Communiqué de Geneviève Fioraso (17 janvier 2013). La Ministre “est convaincue de l’utilité de ces rapprochements [entre CPGE et universités], dans lesquels chacun garde son identité, mais qui, grâce aux échanges, notamment sur la recherche mais aussi sur la pédagogie, établissent des passerelles, au bénéfice de l’intérêt général des étudiants des classes préparatoires comme de l’université. Le partenariat entre classes préparatoires et universités offrira ainsi davantage de droits et de possibilités à chacun des deux systèmes, sans aucune remise en cause de leurs objectifs et de leurs spécificités, qui sont complémentaires”. J’ai rarement vu une telle pauvreté d’argumentation de la part d’un Ministre.

Il n’est donc pas étonnant que, dans un entretien EducPros du 17 janvier 2013, Bruno Jeauffroy, président de l’Union des professeurs de spéciales, s’en donne à cœur joie pour rabattre le caquet à la Ministre. “Il n’est pas toujours évident de trouver des universitaires disponibles pour venir dans les lycées, et prêts à prendre leur paquet de copies à l’issue du cours”… “S’il s’agit simplement, [pour les professeurs de CPGE], de remplacer les PRAG affectés aux universités, je ne vois pas l’intérêt”… “90 % des élèves vont dans des laboratoires de recherche industriels ou universitaires dans le cadre de ces TIPE. Ils bénéficient ainsi d’une initiation à la recherche, beaucoup plus que les étudiants de L1 ou L2 scientifique”…

“Bien sûr, on peut améliorer le fonctionnement des CPGE, mais est-ce vraiment la priorité ? Surtout, il faut faire attention à ne pas casser un système qui fonctionne ! Les prépas coûtent de l’argent, c’est vrai, mais sont rentables pour notre société. La nation investit, et en retour, ces jeunes qui ont réussi leurs études vont payer des impôts, et faire avancer l’industrie française”. Lire la contribution aux Assises de la Conférence des CPGE.

Jean-Luc Vayssière, président de l’université de Versailles Saint-Quentin, joue les bons élèves à l’égard de la Ministre, en publiant le 21 janvier 2013 une chronique sur son blog : “L’UVSQ accueillera tous les élèves de CPGE“. Le rapprochement CPGE / Université valorisera l’université : “Systématiser la démarche permettrait de faire entrer la formation par la recherche dans les prépas. Aux détracteurs qui rétorquent qu’il semble difficile d’instiller une approche de la recherche en première et deuxième année de licence, je réponds qu’il serait certainement plus facile aux étudiants acceptés en classes préparatoires de s’y adapter qu’aux bacheliers technologiques ou professionnels qui sont actuellement à l’université”…

“Le rattachement systématique permettra, en tous cas je l’espère, la prise en compte des moyens investis par les universités dans ce type de partenariat. Les droits d’inscription de 30€ correspondent à l’accès à bibliothèque universitaire, les mêmes que pour nos étudiants traditionnels. Or inversement, la contribution des enseignants-chercheurs qui accueillent les élèves de CPGE n’est pas comptabilisée par le ministère : elle se fait donc sur les moyens propres de l’université, sans aide ni soutien”.

Jean-Luc Vayssière n’est sans doute pas dupe : il sait pertinemment que le Ministère n’accordera pas de moyens pour faciliter les rapprochements. D’ailleurs, la future loi laissera les signataires de convention libres d’en fixer le contenu et… d’en trouver les moyens humains et financiers.

L’article L 612 3 du Code de l’éducation sera modifié. Il n’aura pas d’impact, sinon un impact perturbateur. La Ministre Fioraso ne devrait communiquer que quand elle a réellement quelque chose à dire !

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