Accueil > Revue de presse > Réforme de l’université : une contestation exemplaire - par Florence Boulc’h (...)

Réforme de l’université : une contestation exemplaire - par Florence Boulc’h et Gaetan Hagel, enseignants chercheurs, Rue89, 22 février 2009

dimanche 22 février 2009, par Laurence

Pour lire ce texte sur le site de rue89

Depuis maintenant plus de trois semaines le mouvement de protestation dans les universités françaises ne cesse de s’accroître. Ce mouvement est exemplaire en bien des points et pour cette raison ne s’arrêtera pas sans des changements radicaux dans la façon gouvernementale de s’occuper de l’enseignement supérieur et la recherche.

Retour en arrière : le 22 janvier, alors que se tenait la première réunion de la coordination nationale des universités qui appelait l’université à « s’arrêter » le 2 février si le gouvernement ne revenait pas sur certaines réformes, le président de la république faisait un discours sur la recherche et l’innovation qui a mis le feu aux poudres. Pour beaucoup de personnels de l’enseignement supérieur et de la recherche, ce discours a été pris pour ce qu’il était : une déclaration de guerre.

« L’université n’est pas une entreprise »

Beaucoup de personnels sont alors entrés en résistance contre la politique du gouvernement sur un sentiment de ras-le-bol. Cependant, depuis le mouvement de protestation a beaucoup évolué et ne peut plus s’apparenter seulement à un refus des réformes. Il suffit pour cela de lire les slogans qui fleurissent dans les manifestations : « non à l’université bling bling », « l’université n’est pas une entreprise, le savoir n’est pas une marchandise »…

Ce mouvement a permis à une grande partie du monde universitaire de mettre des mots sur des sensations ressenties et non exprimées pour l’instant : ce gouvernement confond recherche et innovation, il confond également connaissance et diplôme. Pour ces raisons fondamentales l’évaluation quantitative n’apportera pas de réponses pertinentes à toutes les véritables questions que pose aujourd’hui l’évolution de l’enseignement supérieur et de la recherche.

Pour ces mêmes raisons le mouvement tend actuellement à se propager au monde éducatif dans son ensemble. La politique mise en place dans l’enseignement supérieur et la recherche aura des répercussions directes sur l’enseignement primaire et secondaire (réforme dite de la masterisation).

Contre une éducation basée sur la compétition et l’évaluation punition

Mais plus encore, c’est contre une vision de l’éducation basée sur la compétition et l’évaluation punition que les terrain d’entente entre les différentes luttes sont les plus larges : refus de l’évaluation en CM2, non au fichier base élève, réforme du lycée, des lycée pro… et partout, et toujours des suppressions de postes massives et des conditions de travail qui empirent année après année.

Un appel à la grève reconductible à partir du mardi 10 mars a été lancé par les collectifs parents enfants le 7 février dernier sur le slogan « De la maternelle à l’université, contre la casse du service public d’Education, exigeons le retrait des réformes Darcos/Pécresse ».

L’exemplarité du mouvement des universités tient également à la diversité de la forme que prennent ces mobilisations : des grèves, des manifs, des blocages de sites universitaires mais aussi des cours en plein air, dans les transports publics, des lettre de protestation émanant de présidents d’universités ou de personnalités scientifiques de renommée internationale, des pièces de théâtre… C’est à l’université qui saura trouver la forme de protestation la plus originale, la plus festive et évidement la plus médiatique.

Les personnes mobilisées sur les différents campus depuis trois semaines ont déjà beaucoup appris, beaucoup réfléchi et savent à présent pourquoi ils ont ressenti autant de dégoût lors du discours du président de la république le 22 janvier. Ce mouvement est parti sur un air de contestation mais les gens savent à présent pourquoi ils luttent, ce qu’ils rêvent de l’université et ce qu’ils refuseront : ils ne s’arrêteront pas de lutter sur une mesurette gouvernementale de plus.