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Yves Lecointe, président de l’université de Nantes "Il ne faut pas avoir peur de venir à l’université", Le Monde, 8 juin 2011

vendredi 10 juin 2011, par Chabadabada

Propos recueillis par Olivier Rollot

Loi sur l’autonomie des universités, plan licence ou maintenant nouveaux financements dans le cadre du Grand emprunt, l’université française n’est plus le parent pauvre de l’enseignement supérieur. Le président d’une grande université pluridisciplinaire, celle de Nantes avec ses 34000 étudiants, nous dresse le portrait d’un monde en pleine mutation.

Cela doit être formidable de diriger une grande université à un moment où elle est en reconquête de son image et de son public ?

Yves Lecointe : C’est une vraie chance et nous constatons chaque jour des changements, notamment dans nos relations avec les entreprises qui nous comprennent mieux maintenant que nous sommes "autonomes". Et toute l’université est en mouvement. Récemment, nous avons eu un vote quasi unanime pour lancer notre fondation de projets et aller recueillir des fonds. Les entreprises partenaires sont des alliés précieux qui croient en notre excellence et avec lesquels nous co-construisons des projets. Nous venons d’ailleurs de lancer un portail en ligne dédié aux relations université/entreprises : un guichet unique qui leur ouvre toutes les portes de l’université.

Peut-on dire qu’on réussit aujourd’hui mieux qu’hier à l’université, notamment en première année ?

Les taux de réussite des bacheliers généraux (ES, L, S) sont aujourd’hui tout à fait comparables à ceux qu’on constate en classes prépas et en grandes écoles. Il ne faut pas avoir peur de venir à l’université. Ceux qui échouent sont d’abord les bacheliers professionnels pour lesquels l’université est un vrai parcours du combattant. Leur place est plutôt dans les STS (section de technicien supérieur). Même chose pour les IUT (institut universitaire de technologie) et les bacheliers technologiques : c’est leur destination logique. Pour autant, nous devons nous adapter pour les aider à réussir s’ils viennent sur les bancs de nos facultés avec un vrai projet.

A cet effet vous menez des actions de tutorat en première année de licence...

Déceler les étudiants en difficulté est un objectif majeur pour nous. Cela se traduit dans les différentes formations sous de nombreuses formes : tests et contrôles continus, partiels… Ensuite, nous inculquons à ces élèves en difficulté les connaissances et les compétences méthodologiques qui peuvent leur manquer.

Vous avez également mis en place un système d’enseignant référent pour faciliter la transition entre le lycée et l’université...

Répondre aux questions des nouveaux étudiants, les écouter, les conseiller, les orienter vers des ressources ou des services, détecter des difficultés ou encore les motiver font partie du rôle de ce référent. Nous avons aussi créé un véritable monitorat en première année de médecine afin d’éviter aux élèves de payer des cours privés. Nous pouvons ainsi réduire les inégalités entre ceux qui en ont les moyens et les autres. Le suivi des étudiants et la réflexion sur leur insertion sont au cœur de nos préoccupations.

Quand on parle d’échecs à la fac, on oublie aussi que certains y viennent sans trop de motivation...

Oui, parfois juste de passage, parce qu’ils ont été refusés en BTS ou en DUT ou qu’ils veulent tenter un concours l’année suivante, kiné par exemple. Ce sont quasiment des auditeurs libres mais ils pèsent dans nos statistiques. Grâce à un Service d’information et d’orientation (SUIO) très actif, nous aidons toutefois ces étudiants à construire leur parcours. Des ateliers de réorientation sont ainsi proposés chaque année à des étudiants en difficulté afin de les aider à déceler leurs potentialités et à utiliser les passerelles entre les différentes filières. Se réorienter ou réussir un concours fait partie d’un processus d’insertion et non d’échec, comme cela est trop souvent présenté.

Mais comment savoir si on est fait pour telle ou telle filière lorsqu’on est encore au lycée ?

Pour améliorer la réussite de nos étudiants dès leurs premières années d’études, nous avons mis en place une mission université-lycées chargée de coordonner et de valoriser l’ensemble des actions favorisant une orientation active. Un site est entièrement dédié aux lycéens et un DVD présentant toutes les facettes de l’université est diffusé dans les lycées.

Les élèves de terminale peuvent même venir suivre des cours en cours d’année...

Découvrir les cursus est indispensable et nous proposons aux futurs bacheliers de venir suivre des cours à l’université dans le cadre de l’opération "université à l’essai". Cette année, près de 1 000 élèves de terminale ont ainsi pu s’inscrire à 1 ou 2 cours de leur choix dans les 28 filières qui participaient à l’opération, et se rendre compte que l’image qu’ils ont d’une filière n’est pas forcément exacte. En anglais, par exemple, on ne se prépare pas qu’au professorat mais on étudie aussi beaucoup la littérature ou la linguistique, tout comme il faut avoir des aptitudes en informatique ou en sciences pour réussir en psycho ou en Staps…

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