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Fac de Nanterre : « Ne pas répondre au journaliste, même s’il insiste », Emilie Brouze, Rue89, 22 octobre 2012

lundi 22 octobre 2012

Pour lire cet article sur le site de Rue89

INFO SIGNALÉE PAR UN INTERNAUTE

L’université Paris-Ouest-Nanterre pense à tout : pour preuve, cette petite fiche récap’, envoyée jeudi par e-mail, pour « aider » son personnel dans ses relations avec les journalistes.

La note fait deux pages (lire ci-contre), avec petits numéros et listes à puces, et encadre tout contact avec les médias en cas de sollicitation d’interview ou de reportage.

« Il nous semble être une grave atteinte à notre liberté d’expression », s’indigne le maître de conférences qui a envoyé à Rue89 cette note interne (au mépris, donc, de la « procédure presse » en vigueur).

« Ne surtout pas répondre au journaliste »

Dans le document, le service communication et l’agence de presse de l’université proposent leur « soutien » afin d’apporter « tous les éléments utiles au bon déroulé [des] interviews ».

Pour « les sujets sensibles », c’est très pratique : le service com’ se propose d’organiser une « simulation d’interview », afin de « mieux préparer le porte-parole à répondre ».

Il est par ailleurs demandé aux enseignants-chercheurs de tenir informée l’université de tous leurs contacts avec les médias. Notre passage préféré :

« Les journalistes contactent parfois, sciemment ou non, un collaborateur ou une collaboratrice de l’université ne faisant pas partie de l’équipe communication.

Dans ce cas de figure :

Ne surtout pas répondre aux questions du journaliste, même s’il insiste. »

« Une insulte à notre intelligence »

Le maître de conférences en contact avec Rue89 (et qui préfère rester anonyme), a découvert, stupéfait, ces consignes qu’il juge « très paternelles » :

« Nous devrions donc disposer des bons éléments de langage devant permettre de valoriser l’université dans ce qui ressemble à s’y méprendre à une logique de loyauté “corporate” vis-à-vis de notre employeur.

La signification de ce numéro d’autoritarisme managérial pour la liberté de parole des enseignants-chercheurs est assez claire. Il s’agit là d’une remise en cause pure et simple de leur liberté de parole et d’une insulte à leur intelligence.

On est par ailleurs en droit de s’interroger sur l’origine de ce document (quelle instance l’a validé ? A quelle demande répond-il ?) et les débats qui ont précédé l’élaboration de ce projet disciplinaire. »

« Il y a peut-être malentendu »

Rue89 a eu au téléphone le vice-président communication de Paris-Ouest, qui a rédigé et signé la procédure presse. Christophe Boisseau se justifie :

« Ce sont des conseils pour aider ceux qui le souhaitent. C’est un travail lourd pour un enseignant, la relation avec la presse... Mais il y a peut-être un malentendu : nous n’avons pas de volonté de contrôle. »

D’après le maître de conférences qui a contacté Rue89, des élus enseignants devraient interpeller ce lundi après-midi la présidence de l’université à ce sujet, lors du conseil d’administration (dont est membre Daniel Cohn-Bendit).

Hasard du calendrier : l’enseignant-chercheur, inquiet, parle de sa « pire rentrée depuis bien longtemps ». Il explique que chacune des demandes du personnel – comme avoir assez de tables et de chaises pour les étudiants – se bloque au refus de l’université, « rigueur budgétaire » oblige.