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À Montpellier 3 : déficit budgétaire, conséquence de l’autonomie des universités : les mesures étudiées pour 2014 par le Conseil d’Administration.

jeudi 19 septembre 2013, par Laure

Communiqué d’Anne Fraïsse, présidente de l’Université Paul Valéry - Montpellier 3

Fermeture du site universitaire Du Guesclin à Béziers à partir du 1er septembre 2014, mise en place de quotas pour les inscriptions en 1ère année de licence pour les bacheliers 2014, réduction des heures d’enseignements pour les formations à effectifs réduits, gel partiel ou total des recrutements d’enseignants et de personnels administratifs à la rentrée 2014 (75 postes), suppression des financements complémentaires pour le recrutement de doctorants contractuels, désengagement progressif de la formation continue et de la formation des étudiants étrangers, telles sont quelques-unes des mesures que le conseil d’administration a été obligé d’envisager aujourd’hui pour faire face à la crise financière dans laquelle deux gouvernements successifs ont placé l’Université Paul-Valéry Montpellier 3 comme la plupart des universités françaises.

Depuis 2008, l’Université Paul-Valéry Montpellier 3 a réalisé un effort considérable pour remplir ses missions de service public avec des moyens de plus en plus limités. Aujourd’hui, la région Languedoc-Roussillon se place au 3ème rang national pour le nombre d’enseignants-chercheurs dans des unités de recherche classées A ou A+ dans le domaine des Langues, Textes, Arts et Cultures. Le potentiel scientifique de l’Université Paul-Valéry en Archéologie et en Égyptologie est reconnu dans le monde entier. La fondation Hiérolexique qu’elle a créée a reçu un don d’1 million d’euros pour réaliser le premier dictionnaire de hiéroglyphes depuis celui de Champollion.

En formation également l’Université Paul-Valéry se place aujourd’hui parmi les meilleures universités françaises. Elle est, selon les « indicateurs de performances » du ministère, la première en attractivité pour la licence et elle se distingue dans la réussite de ses étudiants, en particulier des étudiants étrangers. Son antenne de Béziers a été jugée « exemplaire » par l’AERES et remplit une mission sociale et de développement du territoire dans un travail conjoint de l’Université et de l’agglomération de Béziers.

Aujourd’hui, le conseil d’administration a cependant été obligé de constater que le désengagement de l’État et, dans une moindre mesure, de la région ne lui permettait plus de faire face à ses obligations financières. Le déficit budgétaire est structurel et il s’explique simplement. Sous prétexte « d’autonomie » des universités, l’État a transféré la charge des salaires des fonctionnaires aux universités sans leur transférer les crédits pour les payer. En 3 ans, l’université constate ainsi que ce sont près de 7 millions d’euros de charges supplémentaires non compensées par l’État qu’elle a du prélever sur ses réserves. L’évolution du SMIC et des charges sociales, la défiscalisation des heures supplémentaires, la licence à 1500 heures … toutes ces mesures décidées par l’État ont été payées par les universités ; sans parler du GVT (Glissement Vieillesse et Technicité) qui en deux ans a coûté près d’1,5M€ à l’Université.

Et le nouveau gouvernement n’a fait qu’aggraver la situation ajoutant aux réductions de crédits un mépris affiché pour les universités et le service public de l’enseignement supérieur, en particulier pour les universités LLASHS.

Le président François Hollande a bien promis de créer des postes et l’université a bénéficié de 13 postes… mais il a repris de l’autre main l’argent qu’il donnait en créant une « contribution exceptionnelle au redressement des comptes publics » qu’il a prélevée sur les crédits des universités. Pour Paul-Valéry, 362.000 € gagnés grâce aux 13 postes… et 400.747 € prélevés pour redresser les finances publiques ; les promesses électorales se sont envolées.

L’Université a fait face et a réalisé plus de 3 millions d’économies sans prendre une seule mesure de dépense supplémentaire. Mais elle ne peut plus aujourd’hui assumer cette diminution croissante de ses moyens et cette augmentation mécanique et politique de ses charges.

Parce que nous voulons continuer à garantir la qualité des formations que nous offrons aux étudiants que nous accueillons, parce que nous voulons continuer à garantir le rayonnement international de notre établissement, parce que nous voulons continuer à nous situer au meilleur niveau de la recherche dans nos domaines d’excellence, le conseil d’administration est amené à faire des choix extrêmement douloureux pour garantir l’avenir de notre établissement. Pour redresser les comptes et supprimer le déficit structurel causé par le désengagement de l’État (3 M€ pour 2014), le conseil d’administration a donc demandé à la présidente de préparer un budget 2014 en intégrant les mesures d’économie suivantes :
- Fermeture complète du site universitaire Du Guesclin à Béziers à la rentrée prochaine (septembre 2014). Les étudiants seront invités à poursuivre leur formation sur le site de Montpellier
- Limitation des inscriptions 2014 en première année de licence dans les filières Arts du spectacle, Arts plastiques, Information - Communication, Psychologie, Administration Économique et Sociale, voire d’autres filières sur leur demande. Les étudiants seront inscrits, selon la loi pour les formations à capacité d’accueil par tirage au sort dans la limite des places disponible
- Réduction des volumes d’enseignement dans les filières à petits effectifs, masters notamment.
- Diminution progressive du financement de la formation continue par l’université
- Diminution progressive du financement de la formation au français pour les étudiants étrangers par l’université
- Diminution des crédits pour l’accueil des professeurs et scientifiques étrangers
- Arrêt du financement par l’université des contrats doctoraux
- Gel total ou partiel pour la campagne d’emplois 2014

C’est avec beaucoup d’amertume que le conseil d’administration a été contraint d’envisager ces mesures qui vont à l’encontre de tout le travail accompli depuis des années et des missions de service public que l’université se doit de remplir.

En voyant les longues files d’étudiants hors délai qui cherchent à s’inscrire aujourd’hui à l’université, en pensant à tous les jeunes encore plus nombreux qui l’année prochaine seront tirés au sort pour entrer dans nos formations ou qui ne pourront pas faire d’études supérieures à cause de la fermeture de notre site de Béziers, nous posons une question à l’Etat : est-ce vraiment ce que vous voulez pour l’université française vous qui vous vantez de faire de la Jeunesse une priorité ?

Anne Fraïsse