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Les MOOCs arrivent en France : un projet qui va mener les profs d’université au chômage - Le Nouvel Observateur, 14 novembre 2013

vendredi 15 novembre 2013, par Elisabeth Báthory

Les MOOCs (pour "Massive Online Open Courses") remplaceront-ils bientôt les profs à l’université ? Ces enseignements gratuits, en ligne et ouverts à tous débarquent en France. Gérard Tremblin, professeur de biologie qui a arrêté d’enseigner il y a quelques mois, met en garde contre les dangers d’un tel projet.

Les MOOCs ("Massive Open Online Courses") un acronyme anglais, cela commence mal pour des cours en ligne issus des universités françaises, mais qui risquent pour la plupart d’être en langue anglaise si l’on écoute les propositions de notre célèbre mathématicien médaillé Field et très en vogue.

L’enseignement en anglais est une passion de notre ministre de l’Enseignement supérieur, si l’on se souvient de la polémique sur la mise en place de cours en anglais dans les universités françaises à laquelle j’ai modestement participé .

Suppression de 99% des professeurs des universités

La démarche de la ministre n’est pas innocente avec, dans un avenir proche, la disparition des enseignements en présentiel, les profs en postes dans les établissements deviendront des répétiteurs et les maître de conférence, en ce qui concerne les sciences expérimentales, n’assureront plus que des travaux pratiques en salle, dans l’attente de la disparition de la manipulation (du latin manipulare, conduire par les mains) déjà remplacé en partie par l’EXSO (expérimentation simulée par ordinateur) dans certaines matières.

Au siècle dernier, lorsque j’étais enseignant coopérant dans une université d’un pays étranger, un autre ministre a essayé de nous filmer et de nous remplacer l’année suivante par des magnétoscopes pour des raisons budgétaires. Devant nos protestations, ce projet qui nous menait au chômage n’a pas abouti.

Oserai-je faire un parallèle avec les éventuelles monstrueuses économies que pourrait faire notre Éducation nationale lorsque les fameux MOOCs seront en ligne ?

Cette fois ce ne sera pas la suppression d’un fonctionnaire sur deux, comme le prônait le précédent président mais de 99% des professeurs des universités.

Des enseignements qui risquent d’être fortement bousculées

On ne sait pas encore qu’elle sera la forme de ces cours en ligne, mais si l’on regarde ce qui se fait ailleurs, c’est plein d’enseignement (si j’ose dire). Les cours de la "Kahn Academy", par exemple, sont impressionnants de réalisme : l’enseignant dont on voit surtout ce qu’il produit au tableau, écrit et dessine encore plus mal que moi. Tout cela est naturellement voulu afin de rendre les cours plus réalistes, mais quel mauvais exemple pour les étudiants. Pour leur défense, les cours de la "Khan Academy" sont déjà pour certains diffusés en français parfois avec un léger accent "British", charmant par ailleurs.

J’ai peur que notre ministre, avec ses MOOCs, même s’ils sont diffusés en langue anglaise (éventuellement avec l’accent de Maurice Chevallier), ait pris un peu de retard pour conquérir le monde.

Pour finir, n’enseignant plus depuis quelques mois, tout cela pourrait me laisser indifférent, mais je pense qu’il est de mon devoir, comme d’autres (article de Luc Le Vailllant dans le "Libération" du 4 novembre), d’alerter mes jeunes collègues universitaires dont les activités d’enseignements risquent d’être fortement bousculées dans un avenir très proche avant de se retrouver au chômage (au moins technique) pour la moitié de leur fonction d’enseignant-chercheur.

A lire sur le site du Nouvel Observateur.