Accueil > Communiqués et textes de SLU > Pour que ça marche ! - Communiqué de SLU, 18 septembre 2014

Pour que ça marche ! - Communiqué de SLU, 18 septembre 2014

dimanche 21 septembre 2014

Pour que ça marche !

Pourquoi l’association Sauvons L’Université apporte-t-elle aujourd’hui son soutien à l’initiative "Sciences en marche" ? Pour trois raisons majeures : parce qu’il est fondamental de dénoncer la crise de l’emploi scientifique ; parce qu’il est plus que jamais d’actualité de pointer les déséquilibres dans les attributions budgétaires (balance entre crédits récurrents et crédits sur projets, place des agences nationales telles que l’ANR ou l’ex-AERES dans leurs processus d’attribution, poids du Crédit Impôt Recherche) ; parce qu’il est important, enfin, de rappeler dans le débat public le défaut de reconnaissance du métier de chercheur et d’enseignant-chercheur (absence de reconnaissance du doctorat dans le privé, de réévaluation des carrières, de contrôle de l’augmentation exponentielle des primes ad personam).

Il n’en reste pas moins que se contenter d’agir sur le point d’aboutissement de la chaîne, même si c’est le plus visible et celui où « ça fait mal », présente le risque de se tromper de solution ou, au mieux, de déboucher sur des mesures dont l’efficacité sera limitée. On a vu récemment qu’un plan pluri-annuel de création d ‘emplois (car il n’est pas interdit d’appeler ainsi les 1000 emplois ouverts chaque année dans l’enseignement supérieur et la recherche depuis 2013) pouvait se transformer en mesure conjoncturelle permettant de combler les déficits budgétaires des universités : il a suffi pour cela de ne pas pourvoir les postes et d’utiliser l’argent à d’autres dépenses, selon le principe de la fongibilité asymétrique. Il ne s’agit pas là d’une perversion du système, mais bien la révélation de sa logique profonde. De même, les engagements sur la reconnaissance du doctorat pour les emplois du secteur privé font partie des promesses répétées depuis une dizaine d’années. Enfin, on a pu voir ce que devenaient les annonces récentes sur le rééquilibrage des crédits récurrents et des fonds ANR. Sur ces trois points essentiels, ce ne sont pas des mesures de circonstances, ni même des interventions d’urgence, qui suffiront : seul un tournant dans la politique de l’enseignement supérieur et de la recherche, un tournant dont, malheureusement, la loi Fioraso n’est en rien le premier signe, pourrait avoir des effets !

Tant que le ministère n’aura pas pris acte du fait que la dévolution de la masse salariale aux universités et les fameuses « responsabilités et compétences élargies » induisent une paupérisation et un déséquilibre budgétaire mécanique des universités, si bien gérées soient-elles, les créations de poste resteront virtuelles.

Tant que le gouvernement ne touchera pas au Crédit Impôt Recherche, que toutes les analyses s’accordent à qualifier de gabegie, l’intérêt qu’il prétend porter à un véritable financement de l’enseignement supérieur et de la recherche ne sera pas crédible.

Tant que les députés voteront les lois sous l’influence de lobbies d’experts autoproclamés sans réfléchir à la bureaucratisation et à l’autoritarisme qui, parés du vocable de « gouvernance » des « nouvelles » universités se substituent à leur démocratie interne, on aura bien du mal à mobiliser le personnel sur un projet de redressement.

Tant que ne sera pas remise en cause l’existence même de l’ANR qui rend impossible le rétablissement de crédits récurrents à la hauteur souhaitable, on se paiera de mots en parlant de rééquilibrage entre crédits sur projet et crédits récurrents.

Alors, marchons, certes, mais pour ce que ça marche, allons jusqu’au bout et demandons des interventions de fond sur ce qui a produit la situation actuelle de l’enseignement supérieur et de la recherche. SLU apporte donc son soutien à l’initiative de « Sciences en marche » mais tient à rappeler que pour que les sciences, leur enseignement, leur pratique, la recherche aillent de l’avant, il est crucial de rompre clairement avec ce qui domine l’organisation de la recherche depuis une quinzaine d’années au moins et qui a trouvé son accomplissement dans une série d’interventions réglementaires ou législatives successives, allant du Pacte pour la Recherche de 2006 à la loi Fioraso de 2013 en passant par la loi LRU de 2007 et les réformes internes du CNRS (création des instituts). Autant dire que le chemin emprunté par trois gouvernements successifs est directement responsable des problèmes actuels de l’enseignement supérieur et de la recherche. Réfléchir, réfléchir collectivement, démocratiquement – et non dans le cadre factice d’« assises » sous contrôle – sur le rôle que doivent jouer la science et les chercheurs dans la société peut être une manière de mesurer toute l’étendue de ces réformes destructrices.