Accueil > Revue de presse > Pécresse joue l’intox, les facs persistent, par Ixchel Delaporte (L’Humanité, (...)

Pécresse joue l’intox, les facs persistent, par Ixchel Delaporte (L’Humanité, 5 mars 2009)

jeudi 5 mars 2009

Alors que la ministre de l’Enseignement supérieur poursuit ses consultations avec les syndicats, le mouvement universitaire retrouve la rue aujourd’hui.

« On a très bien travaillé, on a avancé sur toute une série de sujets ». Depuis quelques jours, Valérie Pécresse pratique l’auto-persuasion. A grands renforts de conférences de presse, elle organise les images de la négociation avec quatre syndicats minoritaires de l’enseignement supérieur. Sans doute aimerait-elle faire croire à l’issue rapide d’un conflit qui agite l’université depuis plus d’un mois. Cette agitation médiatique suffira-t-elle à faire oublier l’ensemble des revendications portées par la communauté universitaire ? Pas sûr.

La focalisation sur le seul décret est une solution à double tranchant. D’un côté, la ministre peut espérer un ralliement des enseignants uniquement engagés sur ce décret et donc provoquer une division à l’intérieur du mouvement. D’un autre côté, elle prend le risque de déclencher la radicalisation et l’élargissement du mouvement étudiant, sans compter l’entrée en scène progressive des enseignants du primaire et du secondaire et des lycéens. Pour preuve : la FSU, première fédération de l’Education, appelle tous les personnels de l’enseignement (primaire, collèges, lycées) et de la recherche à participer à « une journée de manifestations pour imposer une autre politique éducative ». En phase avec les points soulevés par la coordination nationale des universités et par la coordination étudiante, la FSU réclame « un service public d’éducation qui assure la réussite de tous » et « le respect et la reconnaissance de nos métiers et de nos statuts ».

Épreuve importante pour le mouvement, la journée d’aujourd’hui devrait donner une idée de l’état de la mobilisation. Quoi qu’il en soit, en quelques semaines, les coordinations de divers secteurs ont construit par étapes de réelles convergences, sur la défense de la transmission des savoirs et d’un service public de l’enseignement. Les enseignants-chercheurs, soutenus par le Snesup et la Ferc-CGT, ont ainsi été rejoints par les Biatoss, les étudiants, les doctorants, les sociétés savantes, les instituts d’études politiques, les laboratoires de recherche, les collectifs SLR (Sauvons la recherche) et SLU (Sauvons l’université) et plus récemment par trois partis politiques, le PS, le PCF et les Verts. Autre signe en faveur du mouvement : le ministère de L’Enseignement supérieur a contacté hier matin le SNESup, syndicat majoriatire, l’invitant à venir discuter : « Ce rendez-vous n’est en rien une négociation mais une rencontre pour porter les quatre revendications phares de la communauté universitaire », explique-t-on au SNESup. « Chez la majorité des enseignants-chercheurs, c’est l’esprit de solidarité qui prime. Notre mouvement a pris de la force grâce à son élargissement. Nous tiendrons ensemble pour que toutes nos revendications soient prises en compte », explique Bernard Paulré, enseignant-chercheur à Paris I.

Le bras de fer entre le monde de l’éducation et la ministre peut encore durer. Sauf avis contraire d’un président de la République à bout de nerfs, s’il l’on en croit les propos rapportés par Le Canard Enchaîné du 4 mars : « Je ne veux plus voir les enseignants, les chercheurs et les étudiants dans la rue ! Fini le projet de décret. Fini aussi la suppression des IUFM. Vous me réglez ça. Vous vous couchez. Je m’en fous de ce que racontent les cons du ministère(...) On a bien assez de problèmes comme ça. De toutes façon, ce n’étaient que des projets de merde ».