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Contribution de la CPU à la Concertation Nationale « Refondons l’école de la République » - septembre 2012

mardi 18 septembre 2012, par M. Homais

Sur tous les fronts, la CPU… non contente d’avoir droit à une deuxième chance aux "Assises", intervient aussi pour "refonder l’école de la République"

Concertation Nationale
« Refondons l’école de la République »
(juillet-septembre 2012)
Groupe 4 : Des personnels formés, reconnus et valorisés

Contribution de la Conférence des Présidents d’Université La Formation des Enseignants : pour une réforme de la réforme

Si cette contribution s’appuie, pour une large part, sur les réflexions et les propositions toujours d’actualité du groupe « Interconférences » (CPU, CDIUFM, CDUL, CDUS), auteur du rapport sur la Formation des enseignants remis au MEN et au MESR à l’été 2009, elle a aussi fait l’objet d’une réactualisation dans les derniers mois, voire les dernières semaines
L’enjeu
→ Tout mettre en œuvre pour parvenir à une élévation significative du niveau de formation des futurs enseignants et défendre, en l’illustrant, l’idée toute simple qu’enseigner est un métier qu’il convient de reconnaître et de revaloriser. Cette réforme en profondeur de la formation des enseignants doit bénéficier d’un effort sans précédent de co-construction entre, d’un côté, le prescripteur-recruteur et, d’un autre côté, le formateur, autrement dit entre le MEN et les Universités avec l’appui du MESR.

Cinq objectifs intangibles
1. Retrouver une unité de la formation –qui ne soit pas une uniformité-, aller vers une égalité éthiquement nécessaire tant vis-à-vis des candidats que des futurs élèves. Pour ce faire, les objectifs et les contenus du master, à l’instar de ceux du concours doivent relever d’un cadrage national, seul garant de l’égalité des chances et de l’équité territoriale.
2. Garantir des conditions d’accès et de suivi des études, mais également d’entrée dans le métier, qui soient les mêmes pour tous.
3. Éviter les cursus qui enferment les candidats, prévoir dès l’entrée une pluralité de parcours et de sorties professionnelles.
4. Passer d’une logique consécutive à une logique intégrée de formation où l’on pense simultanément l’acquisition des savoirs disciplinaires, des compétences professionnelles, des savoir-faire, des savoir-enseigner, des savoir-être.
5. Construire une professionnalisation progressive depuis le L2 jusqu’au M2, à poursuivre dans les premières années d’entrée dans le métier (T1, T2, T3…) et même au-delà, dans une logique de formation tout au long de la vie.

Les conditions d’accès et d’études, bourses, allocations et pré-recrutement
→ Parce que les situations créées par la « mastérisation » sont dissemblables, dépendant des disciplines, des types de masters, de la taille des régions, des politiques rectorales, du nombre d’universités par académie, des relations Universités-IUFM et/ou UFR-IUFM, etc., il faut garantir des conditions d’accès homogènes et équivalentes sur le territoire national.
→ Pour que les conditions d’accès à la formation et les conditions d’entrée dans le métier soient le plus équitables possible, des bourses d’études et des allocations sont indispensables, cumulant les critères sociaux ou de mérite. De la même façon, des dispositifs d’aide sociale doivent être mis en place afin d’assurer la diversité et la démocratisation de l’accès aux métiers de l’enseignement. C’est d’autant plus nécessaire au regard de l’allongement des études et de la valeur d’exemplarité d’un corps enseignant divers.
→ Les emplois d’avenir enseignement, tels qu’ils vont être mis en place en 2013, doivent favoriser, parallèlement, une politique de pré-recrutement de qualité, dès le L2 ou le L3. La rémunération précoce que ce système instaure favorise la poursuite d’études et doit constituer, pour l’élève-professeur, un engagement responsable à devenir fonctionnaire.

Une formation intégrée
→ La construction des cursus doit se faire de la façon la plus ouverte possible, dans l’esprit du LMD –sous la forme de parcours, de passerelles, de cursus alternatifs, de formations complémentaires, d’options…- afin d’éviter les stratégies d’enfermement et les échecs à répétition.
→ De la même façon, cette construction doit s’appuyer sur des collaborations étroites entre UFR et IUFM dans le cadre des ESPE, entre enseignants, enseignants-chercheurs, professionnels de terrain, intervenants extérieurs, etc. de façon à promouvoir un pilotage partagé de la formation entre l’employeur, le MEN, et le formateur, l’Université.
→ Le souhait d’unité de la formation ne doit pas gommer les spécificités et, donc, les différenciations indispensables entre les métiers et leurs divers contextes d’exercice (PE, PLC, PLP, CPE), entre les secteurs disciplinaires (Sciences et Technologie – ALL/SHS), entre les PLP généralistes et les PLP métiers.
→ Le modèle intégré ici défendu promeut l’acquisition articulée et cohérente de 4 blocs de compétences : (1) savoirs, connaissances et savoir-faire spécifiques nécessaires à l’enseignement de la discipline ; (2) savoirs didactiques et maîtrise des éléments (principes, méthodes, outils) intervenant dans leur transmission ; (3) maîtrise des compétences disciplinaires et méthodologiques nécessaires à l’évolution et l’approfondissement des compétences enseignantes ; (4) savoirs et compétences nécessaires à une claire perception de l’environnement institutionnel et social dans lequel s’inscrivent les missions de l’enseignant.
→Les 4 semestres de master doivent respecter quantitativement et progressivement les dosages respectifs de la recherche, du didactique, du disciplinaire et du professionnel, depuis la sensibilisation jusqu’à la maîtrise des savoirs et des outils, toujours en relation avec l’exercice du métier. Le croisement permanent est indispensable entre compétences académiques et compétences professionnelles. C’est le cœur des enjeux de concevoir une formation intégrant les quatre aspects cités.

Professionnalisation, formation continuée et formation tout au long de la vie
→Les stages doivent être conçus dans un dispositif progressif, depuis la simple sensibilisation (tôt dans la formation) jusqu’à la mise en situation et en responsabilité, depuis la découverte jusqu’à l’expérimentation.
→Les stages doivent être pleinement intégrés dans le dispositif de formation, préparés, encadrés, accompagnés, gratifiés. Le système d’allocations ou de bourses doit donc être en phase avec ces exigences.
→Les stages doivent être suivis conjointement par le milieu académique et le milieu professionnel, donner lieu à une évaluation qui est partie intégrante de la validation du Master.
→Le modèle de M2 en alternance est à retenir, à condition que les périodes effectuées au sein de l’EN soient intégrées au cursus de master et prises en compte dans l’évaluation globale. Il ne peut pas s’agir d’une simple organisation pédagogique pour étudiants salariés.
→Les conditions d’apprentissage des enseignants stagiaires, notamment l’année d’entrée dans le métier –qui doit être allégée-, doivent faire l’objet d’une attention accrue. Les stagiaires doivent avoir l’occasion d’un retour critique sur leurs cours dans le respect d’une culture de l’amélioration continue et du partage d’expérience avec leurs pairs.
→Il paraît indispensable de constituer une équipe de formation autour du stagiaire, incluant le tuteur, l’IPR, le chef d’établissement…, qui garantisse la proximité et la disponibilité des acteurs par rapport au lieu d’exercice du stagiaire
→La formation continuée et de façon plus générale la formation tout au long de la vie sont des processus à lier absolument à la formation initiale des enseignants, que ce soit sous la forme de formation continue diplômante ou de VAE.

Master et concours
→Le rôle du diplôme de master vis-à-vis du recrutement est absolument central. C’est le nœud de la réussite de l’intégration de la formation au niveau master. Le concours doit être absolument repensé dans son rapport au master. En particulier, le concours ne doit pas revérifier ce que valide le diplôme de master. Cette redondance contre-productive dévaloriserait, de fait, les masters universitaires. Cela implique de repenser les épreuves du concours en termes de maîtrise des savoirs fondamentaux et des enjeux professionnels liés au métier et de repenser, dans le même temps, le contenu du master dans le strict respect du cahier des charges du master et du parti pris de formation intégrée où disciplinaire, didactique et professionnel sont équitablement et progressivement répartis.
→Le titulaire du concours doit être titulaire d’un diplôme conférant le grade de master. Il est nécessaire de revoir cette formulation en précisant que le titulaire du concours doit être titulaire d’un diplôme national de master ou d’un autre diplôme conférant le grade de master, à l’issue d’un parcours de formation établissant son aptitude à l’enseignement. Cela reconnaît de fait au master un rôle dans la validation de compétences en lien avec le métier.
→Par là-même, le concours, en classant des recrutés, remplit le rôle naturel et structurel de gestion de l’emploi public. De ce point de vue-là, il s’avère nécessaire d’avoir une vision prévisionnelle et pluriannuelle des emplois, en lien avec les capacités d’accueil des masters.

Place du concours
→ Le positionnement du concours et son contenu ne doivent pas porter préjudice à la qualité et aux exigences du master. En tout état de cause, la place du concours et la façon dont il s’articule avec le master doivent permettre tous types d’orientation ou de réorientations et doivent prendre en compte la meilleure gestion des flux possible. Ainsi le rapport de l’été 2009 avait-il montré les inconvénients majeurs d’un recrutement en fin de L3 ou en totalité en fin de M2 [1].
→ Le positionnement privilégié ici est celui d’un concours en totalité en fin de M1. Si demeure l’inconvénient d’une année de M1 trop orientée vers le concours, les avantages l’emportent :
• l’année de M2 peut devenir une véritable année de professionnalisation aux métiers de l’éducation et de la formation ;
• elle peut être ouverte à des non admissibles qui souhaitent s’orienter vers d’autres débouchés dans le même secteur ou bien qui souhaitent repasser les épreuves ;
• elle permet de faire acquérir les compétences complémentaires en langue et en maîtrise des outils informatiques en situation de formation ;
• elle peut permettre une expérience internationale ;
• elle permet un stage d’initiation à la recherche disciplinaire ;
• le problème des reçus-collés est moindre (M1 validé mais pas admis) car la poursuite serait possible en M2.
→ Un second scénario est envisageable : le concours sur les deux années avec une admissibilité en M1 et une admission en M2. Même si certains inconvénients persistent (le caractère « perturbateur » du concours reste identique, l’admissibilité doit être valable pour plusieurs épreuves d’admission, l’acquisition des compétences complémentaires va de nouveau charger la période, le problème des reçus-collés demeure…), sans doute s’agit-il de la version qui laisse la durée la plus longue à la période d’enseignement et/ou de stage.

Les Écoles Supérieures du Professorat et de l’Éducation (ESPE)
→ La création des ESPE s’inscrit dans le plan ambitieux de refonte du système de formation initiale et continuée des enseignants. Pour cette raison même, ces écoles doivent afficher un lien foncier avec l’Université, qui assume désormais la responsabilité de la formation des enseignants, en vue de la délivrance du diplôme de master que seule l’Université est habilitée à délivrer. En s’appuyant d’ailleurs sur la garantie d’ouverture et d’émulation qu’offre l’Université, ces écoles et les UFR pourraient continuer d’œuvrer mutuellement à la lisibilité et à la co-construction du système de formation des enseignants.
→ Il serait opportun que les ESPE aient un statut de composante de l’Université. Dans ce cadre ainsi défini, le maître d’œuvre de la formation et l’instance de délivrance du diplôme sont indiscutablement l’Université. Peut-être le choix exact du statut de la composante pourrait-il être laissé, en concertation avec le MEN et le MESR, à une instance de régulation de niveau académique, susceptible de prendre en compte les diverses situations, instance dans laquelle toutes les universités concernées seraient représentées.
→ Les personnels des écoles doivent être des personnels universitaires. Toutefois, il paraît important que des membres des corps d’inspection et des personnels exerçant dans les établissements primaires et secondaires puissent aussi être détachés ou mis à disposition des universités dans un cadre contractuel, à temps partiel et/ou pour une durée limitée, pour garantir un lien constant avec les pratiques professionnelles.
→ Il semble raisonnable d’envisager une ESPE par académie –ce qui assure l’équité territoriale- et un rattachement universitaire, soit conforme à ce qui existe déjà, soit à une structure interuniversitaire lorsque les universités non intégratrices sont tout autant que l’université intégratrice impliquées dans la formation des enseignants. Les acteurs académiques pourront s’organiser pour créer une instance inter-établissements sous l’autorité du recteur assurant dans ce cas la cohérence académique de la formation.
→ Les moyens de l’ESPE pourraient provenir de deux sources, à l’instar des formations en apprentissage ; d’une part, provenir du modèle d’allocation des moyens aux universités (SYMPA) et être gérés par l’Université comme pour les autres composantes et, d’autre part, provenir d’une dotation spécifique de l’EN qui serait traitée comme des ressources propres de la composante.
→ Quant aux missions qui pourraient leur être confiées, au sein de l’Université, elles sont de plusieurs ordres :
• maîtrise d’ouvrage de la formation tant initiale que continuée ;
• interfaçage académique, notamment sur la question des stages ;
• mise en œuvre de l’alternance, si ce choix devait être retenu pour l’année d’entrée dans le métier ;
• information et orientation ;
insertion professionnelle en partenariat avec les bureaux d’aide à l’insertion professionnelle, plus particulièrement pour les reçus-collés ;
• observation en matière de pratiques pédagogiques, d’insertion dans le métier, etc. au niveau académique ;
• prise en compte des questions de financement de la FI comme de la FC.


[1Cette solution empêche toute réorientation en cours de cursus : elle ne permet aucune régulation des flux étudiants en lien avec l’admissibilité, ce qui induit un problème pour les stages dans certaines préparations, notamment pour le professorat des écoles ; la charge du S4 est particulièrement forte : préparer les épreuves d’admissibilité, rédiger le rapport de stage, préparer les épreuves d’admission ; le calendrier et les étudiants sont sous pression, avec toutes les épreuves du concours dans une courte période.