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Compte rendu syndical de la rencontre entre la direction scientifique du CNRS et le secteur SHS du SNCS-FSU

26 septembre 2008

vendredi 3 octobre 2008, par Laurence

La réunion, programmée à la suite d’une invitation adressée à la direction du SNCS-FSU, s’est déroulée en présence de Bruno LAURIOUX (directeur scientifique par intérim du département SHS) et Éric BRIAN (DSA chargé de l’agence de moyens).

La délégation SNCS était composée de Philippe BÜTTGEN (co-secrétaire du comité de liaison de la section 35), Sophie DUCHESNE (membre élue au Conseil scientifique du département SHS), Fabien JOBARD, Jean-Luc MAZET (secrétaire général SNCS) et Sophie POCHIC (secrétaire du comité de liaison de la section 36).

Bruno LAURIOUX a commencé par indiquer que le nouveau projet d’Institut National des Sciences Humaines et Sociales (INSHS), consécutif à l’adoption du Plan stratégique du CNRS le 1er juillet, mis en ligne le 24 septembre sur le site du département et diffusé dans les laboratoires (http://www.cnrs.fr/shs/recherche/docs-actualites/Projet%20INSHS_V9.pdf), tenait compte des remarques faites lors du dernier CSD SHS (19 septembre 2008), notamment :

-  l’ajout d’un quatrième domaine d’intervention pour l’Institut SHS, intitulé Les mondes contemporains ;

-  la suppression, sous la mention des domaines d’intervention de l’Institut, de la référence aux disciplines concernées, afin d’éviter de donner l’impression que les domaines distingués dans le projet constituent des regroupements de disciplines. Il est entendu que les sections du Comité national, dont la mention remplace désormais celle des disciplines, pourront chacune être représentées dans les quatre domaines ;

-  la parité entre membres nommés et élus dans les conseils du futur INSHS.

Ce projet peut encore être aménagé : le document diffusé est un document qui servira de base de discussion pendant la période de 4 mois précédant la nomination du directeur de l’Institut (5 janvier 2009). La direction scientifique décrit son projet d’Institut comme l’un des plus avancés au sein de l’organisme et assure que les SHS ne reçoivent pas un traitement différent de celui qui est réservé à l’ensemble des départements scientifiques dans le cadre de la réforme du CNRS.

Le projet, selon Bruno LAURIOUX, a été en l’état bien reçu par la direction générale et la procédure de discussion mise en place a été donnée en exemple à d’autres départements. Éric BRIAN fait état de l’impression similaire qu’il retire de sa participation au groupe de travail DGRI/CNRS sur la mise en place des Instituts. Il présente l’actuel projet comme un « cadrage » pour la direction future et voit dans les mois à venir une « fenêtre d’opportunité » pour définir un minimum de règles du jeu, qui devront selon lui s’appliquer encore après janvier 2009, quand commencera ce qu’il caractérise comme une « année d’essai » pour l’Institut SHS. La direction scientifique n’a pu toutefois donner aucune garantie que le projet actuellement élaboré sera respecté par le directeur du futur Institut. Il n’y a selon elle aucune raison d’être pessimiste quant au caractère « national » de cet Institut.

Le calendrier des réformes tel qu’indiqué par la direction scientifique est le suivant :

-  quatre mois de discussion sur le projet d’Institut jusqu’au 31 décembre 2008 ;

-  2009 : année d’adaptation (avec bilan final), au cours de laquelle les unités se rattacheraient à un domaine principal de l’Institut ;

-  2009-2012 : premier mandat de l’Institut, avec une montée en charge de la fonction d’agence de moyens par rapport à celle d’opérateur de recherche, sans qu’aucun ratio ni aucun objectif chiffré n’aient été précisés quant à la répartition des crédits entre les deux fonctions.

Parallèlement aura lieu la négociation entre le CNRS et les Universités qui, espère Bruno LAURIOUX, devraient avoir acquis en quatre ans la capacité de formuler des priorités scientifiques. Une tripartition relative au devenir des unités a été esquissée par la direction scientifique. D’autres critères ont été avancés dans la suite de la discussion (voir plus bas), sans réel souci de cohérence avec ce premier schéma formulé en termes d’objectifs stratégiques :

- équipe universitaire si le projet n’entre pas dans les priorités du CNRS ;

- si les intérêts sont communs, UMR « opérée » soit par le CNRS, soit par l’université ou l’établissement partenaire ;

- éventuellement UPR si le projet intéresse seulement le CNRS.

La direction a confirmé que le transfert des unités mixtes CNRS à d’autres opérateurs (officiellement désigné comme un changement dans la « nomenclature » des unités de recherche) passerait par les canaux actuels d’évaluation, par les sections du Comité national et le Conseil Scientifique de Département. Ce transfert ne passerait pas par des mises en FRE, et la direction assure que les mises en FRE actuellement décidées signifient seulement que le CNRS souhaite une restructuration ou une modification du périmètre de l’unité. Concédant des « à-coups » dans le discours tenu par la direction devant le CSD SHS du 19 septembre, Bruno LAURIOUX assure que les discussions menées avec les universités et établissements partenaires sur les associations des unités de recherche de la vague C relèvent du rythme habituel des négociations et qu’elles ne sont pas concernées par l’évolution à prévoir des « nomenclatures » de laboratoires.
Reprenant les termes du directeur général du CNRS lors de la réunion des directeurs d’unités SHS tenue le 10 septembre 2008 à l’Institut National d’Histoire de l’Art, le directeur scientifique a indiqué qu’en cas de transfert d’une unité de recherche vers un autre opérateur le CNRS veillera à la qualité de la gestion au moyen d’une « charte » ou d’un contrat de service visant à garantir des principes de base, comme la durée d’ouverture des locaux, l’existence d’un conseil de laboratoire ou le respect des définitions de poste des personnels à statut CNRS qui y travaillent.

Les membres de la délégation ont fait observer que ces garanties, quand elles sont effectivement tenues, ne représentent que le réquisit minimal du bon fonctionnement de la recherche. Ils ont souligné le risque que certaines universités ou établissement richement dotés veuillent d’emblée s’arroger les meilleures unités, ce qui, une fois réalisée par ailleurs l’éviction des unités plus faibles, reviendrait à resserrer le périmètre du CNRS sur le « milieu de gamme », contrairement aux ambitions affichées. La direction scientifique a reconnu que ce risque existait. Il a été fait valoir que pour rester opérateur de recherche de certaines unités hébergées dans les universités ou les établissements, notamment sur les sites issus du récent Plan Campus, le CNRS sera peut-être obligé de prendre en charge les frais de location, ce qui – effet immédiat du principe de l’hébergeur-payeur – grèvera son budget déjà en restriction. Que se passera-t-il si ni le CNRS ni l’université ne veulent d’une unité qui n’entre pas dans leurs priorités stratégiques respectives ? La direction a assuré que les procédures de mobilité des personnels CNRS, chercheurs comme ITA, resteraient en vigueur, avec les mêmes instances délibératives.

Éric BRIAN travaille actuellement à définir le fonctionnement de l’agence de moyens, qui disposera d’un budget propre par rapport à l’opérateur de recherche, selon le principe d’infongibilité des budgets qui doit régir la réforme du CNRS. L’agence de moyens pourrait venir en complément de l’ANR, qui soutient des projets de moyen terme (3-4 ans) pour financer :

-  des investissements ponctuels, sur des projets de court terme : pour une unité de recherche, mais aussi pour une équipe, voire un chercheur individuel, sur le modèle des PEPS déjà existants en SDV ou STII (projet assez léger, moins de 5 pages, et rapport d’une page) ;

-  des investissements de long terme, comme le CNRS le fait déjà pour les revues ou pour les réseaux de type GDR, GDRE ou GDRI (même si pour l’instant le budget est à chaque fois attribué à un laboratoire).
Le travail sur l’agence de moyens est présenté comme l’apport spécifique de la nouvelle direction intérimaire par rapport à la réflexion antérieurement menée sur l’Institut. Le DSA a indiqué qu’à ses yeux un certain nombre de fonctions des directions scientifiques relèvent typiquement d’une agence de moyens comme, en SHS, le soutien aux revues. Il a reconnu que le soutien accordé par l’agence de moyens du nouvel Institut passerait en grande partie par des affectation de personnels, en confirmant que ces affectations seraient en outre temporaires.

Pour respecter le principe de la double tutelle (chiffre maximum) imposé par les conclusions du rapport d’Aubert, les unités de recherche qui souhaitent conserver plusieurs tutelles (à l’instar, précise Éric BRIAN, de nombreux laboratoires parisiens) pourraient passer sous le régime de l’agence de moyens. Aux questions posées sur le sens de l’expression « passer sous le régime de l’agence de moyens » et sur sa difficile insertion dans le schéma tripartite d’abord présenté (qu’en sera-t-il du statut de ces unités en « régime d’agence de moyens » ?), il a été répondu qu’il s’agissait notamment d’attributions de budgets dans un cadre pluriannuel, sur un mode différent de celui de l’association quadriennale, bien que quatre ans continuent de représenter une durée pertinente aux yeux des membres de la direction scientifique présents lors de l’entretien.
La notion d’affectation temporaire de chercheurs dans les unités relevant de l’agence de moyens, qui a fait beaucoup réagir la communauté, serait à but « protecteur » ; selon la direction, elle viserait à signifier à l’université ou à l’établissement hébergeur qu’il ne peut s’approprier ce personnel, qui pourra être réaffecté à d’autres projets ou à d’autres unités. L’éventualité de mises à disposition a cependant été évoquée, sans aucune précision.
L’agence de moyens pourra elle aussi recruter du personnel statutaire, sur des postes « fléchés ». Les représentants du SNCS ont rappelé que les sections sont opposées aux postes fléchés, en raison de leur temporalité souvent décalée par rapport à celle de la production des thèses. La direction juge qu’une mauvaise définition des fléchages est le plus souvent en cause. Au passage, elle confirme la fin des supports post-doctoraux au département. Éric BRIAN estime que l’avenir du recrutement de chercheurs statutaires est garanti par la préoccupation d’une prévisibilité en matière de mouvements de personnels, qu’il a récemment ressentie de la part de ses interlocuteurs de la DGRI.

Si l’Institut SHS reçoit le label d’Institut national comme le souhaite la direction du Département, il aura un rôle de coordination nationale et aura vocation à développer sa propre prospective, à travers les sections du Comité national. Les représentants du SNCS ont souligné le risque que le CNRS devienne surtout pourvoyeur de moyens humains pour les projets thématiques définis par l’ANR, qui ne dispose que de moyens financiers sans personnel statutaire. Ils ont également demandé comment les sections allaient développer le rôle de prospective qui est d’ores et déjà le leur alors que l’évaluation des unités leur échappe depuis la création de l’AERES. La direction estime que la prospective de l’Institut national SHS (s’il est créé) interviendra dans la définition des programmes à moyen terme de l’ANR, programmes complémentaires par rapport à l’agence de moyens (centrée sur le court terme et le long terme). Le Ministère souhaiterait d’ailleurs un certain cadrage de l’ANR pour une utilisation plus efficace des fonds publics.
Concernant la désignation du directeur de l’Institut SHS, et alors qu’on attend encore que soit rendue publique la composition du « search committee » chargé de procéder à la sélection des candidats selon des « normes scientifiques internationales » (lettre du directeur scientifique par intérim aux directeurs d’unités SHS, 2 septembre 2008), l’hypothèse d’une nomination ministérielle directe a été à nouveau évoquée par la direction ; l’exemple de l’Institut National des Sciences de l’Univers (INSU) a été cité.

Les représentants du SNCS ont enfin abordé le débat actuel sur la bibliométrie et ont interpellé la direction sur l’insistance actuelle de la DPA (Direction des Partenariats) à faire remplir par les laboratoires les fiches individuelles censées permettre la « caractérisation » des unités de la vague C (http://www.cnrs.fr/dpa/caracterisation/index.htm). Le SNCS-FSU a appelé les chercheurs à ne pas renseigner les cases strictement bibliométriques (Web of Science, h-factor) de ces questionnaires et confirme l’existence de tentatives pour calculer ces données à l’insu des chercheurs. La délégation SNCS a demandé des précisions sur le poids des indices bibliométriques dans le travail de caractérisation des unités, ainsi que dans les dés-associations d’unités de recherche dans le cadre de la réforme du CNRS : les décisions de renouvellement ou de non-renouvellement de partenariat se feront après une discussion entre la DPA, la direction scientifique et les présidents d’universités ou d’établissements. La direction a reconnu l’insistance de la DPA et rappelé qu’elle s’inscrit dans le cadre de la LOLF, qui impose la définition de critères d’évaluation, tout en indiquant que le calcul bibliométrique représente à ses yeux un élément d’appréciation parmi d’autres. En invoquant l’indétermination des critères de la LOLF en matière d’évaluation de la recherche et en rappelant le travail de la commission mixte Direction scientifique/CSD SHS (Michèle DASSA, Isabelle SIDERA), elle a indiqué que la communauté scientifique devait participer au débat en émettant des critiques sur une évaluation purement bibliométrique et en développant une contre-expertise. Éric BRIAN dit travailler, en sa qualité d’historien des sciences, à convaincre la DPA que l’évaluation bibliométrique actuellement imposée n’est pas ajustée à ses objectifs, car elle n’atteint selon lui que l’aval (ce qui a été publié depuis cinq ans) alors que le CNRS doit se préoccuper de prospective, donc de l’amont (ce qui sera publié plus tard). Elle évalue en outre la notoriété ou la diffusion, et non pas la qualité de la production scientifique. Le DSA veut croire qu’une partie de ces problèmes sera résolue par le travail qu’accomplira la direction future de l’Institut National des SHS.

Compte rendu rédigé par Sophie POCHIC et Philippe BÜTTGEN,
pour le secteur SHS du SNCS-FSU.