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Alerte sur la santé des étudiants - Le Parisien, Odile Plichon, 12 mai 2015

samedi 16 mai 2015, par Mr Croche

Remboursements, cartes Vitale, délais… un rapport du Défenseur des droits sur la LMDE, la première mutuelle des étudiants, est sans appel. Le gouvernement doit trouver une solution avant août.

A lire sur le site du Parisien

Etudiants atteints d’un cancer payant eux-mêmes leur traitement, cartes Vitale n’arrivant jamais à bon port, conseillers injoignables… Ce n’est pas le premier rapport sur le sujet, mais celui-là pourrait définitivement sonner le glas de la mutuelle des étudiants la plus — tristement — célèbre : la LMDE.

Alors que cette mutuelle, qui prend en charge près d’un million d’étudiants, est sous tutelle* depuis février pour cause de déficit abyssal, le Défenseur des droits s’apprête à dévoiler un rapport au vitriol** sur cette structure érigée en 2000 sur les ruines de la Mnef.

Un rapport d’autant plus inquiétant qu’il est basé sur un appel à témoins : entre fin 2014 et février 2015, pas moins de 1 500 étudiants y ont spontanément répondu. Le verdict est sans appel. Actuellement, des centaines de milliers d’étudiants renoncent parfois à se soigner, faute d’être pris en charge — un constat particulièrement gênant, la LMDE faisant à la fois office de mutuelle et de régime de santé de base. Retour sur les principaux griefs formulés par les étudiants.

Affiliation à la Sécu : des retards XXL

Des étudiants se trouvent privés de Sécurité sociale effective, parfois pendant plusieurs mois, après leur inscription : 26% de ceux ayant répondu à l’appel à » témoins sont concernés. Comme Emma, inscrite en octobre 2014, affiliée en… mars 2015. En attendant, 22% ont dû avancer leurs frais, car « ils ne peuvent plus bénéficier, pendant une durée indéterminée, de la prise en charge de leurs dépenses. Ils sont confrontés à des ruptures de droits partielles ou totales », pointe Jacques Toubon, le Défenseur des droits, qui se traduisent par des renoncements aux soins. Et de pointer le cas des étudiants à la CMU-C, encore plus fragiles du fait de leurs faibles revenus.

Maladies graves : la grande inquiétude

Autre cas de figure préoccupant, celui des jeunes en théorie pris en charge à 100%, pour cause d’affection de longue durée (diabète, sclérose en plaques, cancer). « Les traitements suivis peuvent être particulièrement coûteux, jusqu’à plusieurs milliers d’euros chaque mois. » Or Luc, atteint d’un cancer, n’a finalement été remboursé à 100 % qu’après intervention des services du Défenseur des droits. D’autres étudiants en ALD, eux, se voient délivrer une affiliation classique. Exit, alors, le 100%… En cas de report des soins (dentaires, examens, etc.), le risque d’une aggravation ultérieure est avéré.

Etre remboursé, sacré défi 57% des étudiants ayant répondu ont eu des difficultés : six mois, un an de retard… ubuesque.

Médecin traitant, le bug

« J’ai donné trois fois ma feuille de déclaration de médecin traitant, ils l’ont perdu deux fois » ! 19% des étudiants témoignent en ce sens. Le hic ? Comme il est obligatoire de déclarer un médecin traitant, les assurés qui n’en déclarent pas sont moins bien remboursés.

Cartes Vitale inutilisables

Retards d’un an avant de recevoir le précieux sésame, carte non fonctionnelle, doublons… 36% des sondés signalent un problème ! Du coup, les feuilles de soins papier débordent. Le tiers payant, surtout, reste un vœu pieu.

La LMDE aux abonnés absents

Tous les étudiants pointent un défaut d’information : dans un cas sur deux, ils n’ont jamais eu de réponse. Pis, dans 77% des cas, quand la réponse arrive, il est trop tard ! Enfin, si le mot « incompétence » n’est pas prononcé, la qualité et la pertinence des informations génèrent des réclamations à gogo.

Les préconisations : revenir au BA-ba du métier !

« La liste des défaillances est longue », conclut le document, et ces difficultés sont « régulièrement dénoncées depuis des années, sans qu’aucune amélioration significative n’ait été constatée à ce jour », tacle le rapport, qui liste ce qu’il faudrait — enfin — faire : donner une carte Vitale aux étudiants, accélérer les délais de remboursement, prendre en charge à 100% les jeunes vraiment malades. Un parfait petit abécédaire des missions de la Sécurité sociale.

En arrivant au pouvoir en 2012, François Hollande s’était engagé à ériger l’accès aux soins des plus démunis en priorité. Dans son introduction, le Défenseur des droits ne se prive d’ailleurs pas de citer le préambule de la Constitution de 1946 : « La nation doit garantir à tous la protection de la santé. » Ces derniers mois, le débat sur le tiers payant pour tous a accaparé l’espace public. Plus explosive encore, la question du non-accès aux soins des étudiants mériterait également un véritable débat public. Il est encore temps.

* Elle a été placée sous sauvegarde de justice pour six mois.
** « Accès des étudiants aux soins : leur protection sociale est-elle à la hauteur des enjeux ? », mai 2015.

En complément : lire
La LMDE n’assurera plus la sécurité sociale des étudiants, Caroline Coq-Chodorge, Médiapart, 12 mai 2015.