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La cure d’austérité se poursuit dans les universités - Camille Stromboni, Le Monde, 7 novembre 2018

jeudi 8 novembre 2018, par Laurence

Malgré un budget 2019 en hausse, les établissements sont contraints à des économies

La pilule ne passe plus », pour Yann Le Page, élu CGT à l’université Rennes-I. Son établissement s’engage dans de nouvelles mesures d’économies, avec une centaine de suppressions d’emplois dans les trois prochaines années, d’après le « plan de retour à l’équilibre » approuvé le 25 octobre. Après deux exercices budgétaires en déficit, les universités doivent adopter des « plans de rétablissement de l’équilibre financier », avec un contrôle préalable du recteur d’académie. « On n’appelle pas ça une mise sous tutelle de l’Etat, mais c’est exactement la même chose  », affirme Yann Le Page.

L’université bretonne n’est pas la seule à avancer sur cette voie d’austérité. A Lille, la nouvelle fac – un mastodonte de 70 000 étudiants issu de la fusion des trois établissements lillois au 1er janvier 2018 – se prépare à un plan de redressement sur cinq ans, dans lequel 73 emplois d’enseignants-chercheurs et de personnels administratifs ne devraient pas être remplacés. A Orléans, une trentaine de postes devraient rester inoccupés en 2019.

La ministre de l’enseignement supérieur, Frédérique Vidal, devait présenter devant les députés, mercredi 7 novembre, un budget pour 2019 en hausse de 166 millions d’euros. Pour le gouvernement, il s’agit de montrer la « priorité stratégique » que constituent les universités, comme elle l’a souligné lors de son audition devant les sénateurs mardi.

« Plus de souffrances »

Depuis le passage à l’autonomie des universités en 2007, l’équation est complexe : la dotation que l’Etat leur attribue n’a pas suivi l’augmentation mécanique de leurs charges. Celles-ci sont grevées principalement par la progression de leur masse salariale, due à l’évolution de carrière de leurs personnels fonctionnaires, appelée le « glissement vieillesse technicité ». En parallèle, la démographie étudiante ne cesse d’augmenter. Entre 20 000 et 60 000 étudiants supplémentaires sont accueillis chaque année depuis cinq ans.

Cinq universités se retrouvent en déficit, ainsi que trois en double ou triple déficit – soit 10 % d’entre elles, d’après les données du ministère portant sur l’année 2017. « L’analyse des comptes financiers met en évidence une situation globale satisfaisante, avec une progression des principaux indicateurs financiers par rapport à 2015  », précise-t-on au cabinet de Frédérique Vidal. « Le nombre d’universités en difficulté est relativement stable », abonde Gilles Roussel, à la tête de la Conférence des présidents d’université, qui souligne l’amélioration de la capacité de prévision des établissements en matière budgétaire. Selon la dernière note de la Cour des comptes publiée en mai, une dizaine d’établissements sont dans une situation budgétaire « dégradée  » ou « très dégradée », un chiffre en légère baisse par rapport en 2017.

« On pourrait croire que la situation s’améliore, mais c’est à cause d’une austérité drastique imposée dans les établissements depuis plusieurs années  », dénonce Hervé Christofol, secrétaire général du Snesup-FSU.

A Rennes-I, 100 postes ont été « gelés » (non remplacés, après des départs à la retraite) depuis 2016, d’après l’intersyndicale qui s’est constituée pour s’opposer au nouveau plan d’économies dans l’établissement, qui compte 30 000 étudiants et 3 200 personnels. « On voit des services qui fonctionnent avec moitié moins de personnels, des gens surchargés, et toujours plus de souffrance au travail  », alerte Patrick Chasle, ingénieur d’études, délégué du SNPTES, qui a participé à une manifestation devant la présidence de l’université rennaise, le 25 octobre, pour en appeler au soutien de l’Etat.

L’incertitude demeure

« En 2018, pour la première fois, l’Etat a financé notre “glissement vieillesse technicité” à 75 %, salue David Alis, à la tête de l’université Rennes-I, et coanimateur d’un groupe de travail sur les plans de redressement chez les présidents d’université. Mais d’autres charges continuent à augmenter sans être compensées, comme la hausse de la CSG [contribution sociale généralisée] qui représente 1 million d’euros pour nous.  » L’incertitude demeure sur le niveau de compensation que va obtenir chaque établissement en 2019, alors que le gouvernement assure que 103 millions d’euros sont prévus au budget – en tenant compte des redéploiements de crédits – pour ces charges obligatoires que la Conférence des présidents d’université a évaluées à plus de 130 millions d’euros pour 2019.

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