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Prise de température dans une université bloquée, Toulouse II, LibéToulouse

mercredi 1er avril 2009

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01/04/2009

Prise de température dans une université bloquée

TOULOUSE-II. Bientôt un mois de piquets de grève : depuis le 5 mars au soir, l’université des Lettres et Sciences Humaines du Mirail est bloquée par les étudiants opposés à la réforme de l’enseignement supérieur.

« Essentiel dans le rapport de forces avec le gouvernement » pour les uns, « démobilisateur » pour les autres, le blocage a été reconduit par l’AG de ce mardi 31 mars.

En tout cas, ce n’est pas vraiment la fièvre des grands mouvements dans les couloirs et les allées du campus sont à peu près désertes.

11H00 : L’Arche, le bâtiment situé à l’entrée des lieux est « réquisitionnée ». Ils sont une dizaine de grévistes à s’y croiser ce matin. Dans le hall, un comptoir et des tables chargées de machines à café. Étudiant en géographie de 22 ans, Sylvain est là qui colle la revue de presse du jour sur l’un des murs. « On commence à ressentir la fatigue. Mais, assure-t-il, c’est parti pour durer au-delà des vacances de Pâques ».

Aux étages, les salles de cours sont censées servir de lieux de réunion aux « comités de lutte » : le comité « action » pour les manifestations dans les rues de Toulouse et « interne » pour l’organisation de l’occupation de la fac. Le comité « externe » pour les relations avec les médias ne laisse rien voir aux médias du travail qui serait en train de s’y faire.

L’amphi est occupé par les AG. Ce mardi matin, celle des enseignants rassemble mollement une cinquantaine de profs et d’étudiants. La sono est faiblarde. « C’est à cause des anti-bloqueurs. Ils ont bousillé les micros au début du mouvement, raconte Mathieu, 20 ans. On a bricolé une installation avec les moyens du bord ».

Valérie qui enseigne la psychologie assiste aux débats. Gréviste, la jeune femme est cependant contre le blocage : « Ça démobilise, dit-elle. Á cause de ça, la majorité des étudiants ne viennent plus ».

« C’est la seule façon de créer un rapport de force, rétorque Jeff, 24 ans, l’un des porte-parole des grévistes du Mirail. Ça permet de massifier la lutte et d’avoir un espace de débats permanent ». On dira que les masses n’étaient pas en débat ce mardi matin.

11h30 : le campus et vide. Devant les locaux de l’administration, six ou sept membres du comité « Action » attendent la sortie de la délégation reçue par le responsable de la vie universitaire. « Un étudiant qui taguait l’un des murs a été interpellé par la sécurité. Nous avons demandé l’abandon des sanctions à son encontre », explique Julie, 23 ans.

Retour à la machine à café de l’Arche. Jeff donne à un étudiant des nouvelles du « camarade » Johann, blessé à l’œil lors de la manifestation interprofessionnelle du 19 mars dernier : « la Brigade Anti-criminalité nous a chargés à la grenade assourdissante et aux tirs directs de flash balls. Johan y a perdu une partie de la vue. Il est sorti de l’hôpital aujourd’hui. Mais il devra y retourner pour des opérations de chirurgie. La répression policière contre le mouvement s’accentue ».

12h00 : Un petit groupe de profs prend le café à la terrasse de l’un des cafés à la sortie en allant vers le métro. Viviane, une enseignante opposée à la réforme, pense elle aussi que le blocage « démobilise et produit l’inverse de l’effet recherché ».

C’est morne plaine. Mehmet, le patron de l’un des kébabs qui ne désemplissent jamais à cette heure se désole au spectacle de ses tables vides : « C’est dur. On ne travaille plus, dit-il. Depuis le début, le chiffre d’affaires a chuté de 70%. On aimerait bien que ça s’arrête ».

12h30. L’AG des grévistes se tient dans le grand amphi de l’Arche. Elle reconduit le blocage.

J-M.E