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"Rennes 2. Lettre ouverte du président aux parents", Le Télégramme.com, 30 avril 2009

samedi 2 mai 2009

Marc Gontard, président de Rennes 2, répond aux questions que se posent les parents d’étudiants et l’association Génération Bretagne qui fédère un certain nombre d’entre eux. Une tribune libre sur de légitimes inquiétudes.

"J’ai reçu à deux reprises Mme Rimbourg, présidente de l’Association « Génération Bretagne » afin de répondre aux questions fort légitimes, qu’à travers elle, se posent les parents. Si la seule conclusion de nos discussions est la demande faite au recteur de démissionner un président « dépassé par les événements », ces propos, en contraste avec la teneur de nos échanges, jettent un doute sérieux sur les motivations réelles de cette association.

Mission de service public

En effet, comme je l’ai longuement expliqué à Mme Rimbourg, l’université est une institution dont le fonctionnement n’a rien à voir avec celui des grandes écoles par exemple.

L’université a une mission de service public. Elle se doit d’accueillir, sans aucune sélection à l’entrée, tous les bacheliers qui en font la demande et, dans le cadre de la gratuité des études, avec les ressources limitées qui sont les siennes, son rôle est d’amener ces étudiants à un niveau d’études supérieures leur permettant une insertion professionnelle. Compte tenu de ces contraintes particulièrement exigeantes l’université est donc, par excellence, cet espace démocratique qui offre aux classes les moins favorisées une possibilité de promotion sociale. C’est pourquoi toute réforme non concertée qui peut apparaître comme une remise en cause de ce modèle engendre une inquiétude toute particulière.

Un simple contrôle de légalité

Dans un tel système, le président n’est pas nommé par le pouvoir, mais démocratiquement élu par le conseil d’administration. Seul, un conflit majeur avec ce conseil peut donc le conduire à la démission. Le recteur, chancelier des universités, n’a de ce point de vue aucun pouvoir hiérarchique. Sa mission consiste à exercer un simple contrôle de légalité sur les délibérations du conseil d’administration et, dans le cadre des nouvelles compétences octroyées par la loi LRU, il se verra confier, en outre, le contrôle financier pour lequel il devra lui-même s’entourer de compétences qu’il ne possède pas.

Une démission également réclamée par les étudiants

Demander au recteur, voire à la ministre, la démission d’un président témoigne d’une volonté de méconnaître le système universitaire malgré toutes les explications qui ont été fournies à Mme Rimbourg sur le sujet. Cette demande est d’autant plus surprenante qu’elle rejoint, pour des raisons opposées, celle des étudiants bloqueurs, alors que la présidence met tout en œuvre pour permettre des rattrapages et la tenue des examens avant l’été, dans des conditions extrêmement difficiles, avec l’appui d’une grande majorité d’enseignants.

Crise de société générale

Le mouvement actuel au sein des universités n’a pas pour cause l’incompétence des présidents, la moitié d’entre eux devrait alors démissionner dont celui de la Sorbonne où, contrairement à Rennes 2, il n’y a pas eu un seul cours au second semestre. Ce mouvement, qu’il faut rattacher à une crise de société beaucoup plus générale, a eu comme point de départ une série de réformes mal préparées et imposées sans concertation qui ont dressé contre le gouvernement le monde universitaire (enseignants-chercheurs et étudiants).

Appel aux forces de l’ordre

Si la présidence, depuis le début du mouvement lutte contre le blocage qui affaiblit l’université et les disciplines qui sont les siennes, ses moyens légaux sont extrêmement limités face à un groupe violent et décidé. La solution ne peut venir que du ministère qui tarde à apporter une réponse définitive aux problèmes posés. L’appel aux forces de l’ordre qui pourrait apparaître comme une réponse définitive aux yeux des amis de Mme Rimbourg, est une solution illusoire sur un campus universitaire. Le préfet de région en sait quelque chose pour n’avoir pas lui-même de réponse efficace, autre que très ponctuelle, à apporter dans une telle situation.

Le roi nu...

Enfin, Mme Rimbourg a dû se rendre compte, personnellement, combien il est difficile de mobiliser les forces anti-blocage, pourtant majoritaires, puisque malgré la campagne médiatique autour de son action, elle n’a pu réunir, le 29 avril, sur le campus de Rennes 2 qu’une poignée de parents et d’étudiants, « incompétence » qu’elle partage, pour le moins, avec le président qu’elle met en cause. Un président d’université n’est rien d’autre que ce « roi nu » qu’évoquait récemment un très bon article de la presse régionale…La crise que nous traversons à tous les niveaux de la société mérite une analyse et des réponses plus sérieuses qu’une polémique de ce type dont on peut craindre l’engagement partisan."

Marc Gontard, Président de l’université Rennes 2 - Haute Bretagne


Voir en ligne : http://www.letelegramme.com/une/ren...