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Le bras de fer entre grévistes et gouvernement nuit à l’image des formations - Denis Peiron, La Croix, 5 mai 2009

jeudi 7 mai 2009

Dans de nombreux cas, le deuxième semestre pourrait être validé sur la base de quelques semaines de cours seulement.

Le deuxième semestre sera-t-il validé ? Et si oui, comment ? Ces questions sont devenues lancinantes dans la vingtaine d’universités qui restent concernées, à des degrés divers, par le mouvement de contestation amorcé il y a quatorze semaines. Nombre de cours n’ayant pas été dispensés, certains grévistes réclament une validation d’office ou bien – cela revient presque au même – une délivrance du diplôme sur la moyenne des cinq premiers semestres pour ceux qui achèvent leur licence, une option aujourd’hui envisagée à Paris IV.

La ministre de l’enseignement supérieur, Valérie Pécresse, a toujours écarté pareilles solutions. Il n’empêche, dans bien des établissements, on a beau prévoir des cours de rattrapage, les examens repoussés à des dates ultérieures ne permettront de contrôler qu’un volume très restreint de connaissances.

Pour Jean-Marc Pitte, l’ex-président de Paris IV, connu pour ses prises de position en faveur d’une sélection à l’entrée de la «  fac », cela remet en cause la valeur du diplôme obtenu et nuit à l’image des formations universitaires. « Cela conforte les recruteurs dans l’idée qu’il n’y a pas grand-chose à tirer d’un candidat titulaire d’une licence universitaire, le niveau d’étude le plus touché par le mouvement. À terme, même les “bons” diplômes d’université, notamment les masters professionnels, vont en souffrir », estime-t-il.

"Ce sont les réformes qui réduisent la valeur des diplômes"

Porte-parole de SUD-étudiant, Marine Raoul dit avoir eu conscience, dès le départ du mouvement, que son diplôme futur n’aurait « pas la même valeur » que s’il avait été obtenu à l’issue d’un cycle complet d’enseignement. Mais, dit-elle, « nos diplômes sont de toute façon dévalorisés par la loi d’autonomie », votée en 2007 et dont elle réclame l’abrogation.

« Ce sont avant tout les réformes gouvernementales qui réduisent la valeur des diplômes », renchérit Jean-Louis Fournel, professeur au département d’italien de Paris VIII et porte-parole du collectif Sauvons l’université. « Un exemple : la modulation de service prévue dans le nouveau statut des enseignants-chercheurs va conduire nombre d’enseignants à ne plus faire de recherche. Leurs travaux ne viendront plus nourrir les cours. »

PDG de Cristel, une PME spécialisée dans les arts de la table, Bernadette Dodane apporte toutefois une petite lueur d’espoir : « Bien sûr, le fait d’avoir obtenu un diplôme malgré la suppression de nombreux cours joue en la défaveur des jeunes issus de l’université, souligne-t-elle. Mais en tant que recruteur, il faut faire la part des choses. Beaucoup d’étudiants subissent ce mouvement. Et puis, bien d’autres facteurs entrent en ligne de compte lors d’un entretien d’embauche : la compétence, les stages effectués, l’approche du métier… »

Denis PEIRON


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