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L’université cherche à rebondir après la crise - Sud-ouest. com, 10 juin 2009

jeudi 11 juin 2009

Avec la réouverture du campus du Mirail à Toulouse il y a quelques jours, après une intervention policière sans nuances, le conflit qui durait depuis quinze à vingt semaines dans plusieurs universités françaises s’est officiellement achevé. Le dernier bastion des protestataires est tombé. L’épilogue à une crise profonde qui a secoué le monde universitaire, et dont il doit maintenant se relever. Une tâche d’autant plus difficile que ce mouvement n’avait rien d’uniforme.

Enseignants-chercheurs au départ

La grande majorité des universités ont certes été, à un moment ou à un autre, touchées par ce conflit. Mais c’était au début. Lorsque la mèche était allumée par la publication d’un décret sur le statut des enseignants-chercheurs et un discours pour le moins maladroit du président Nicolas Sarkozy à ces mêmes chercheurs. Ce sont ces professeurs d’université qui ont lancé le mouvement un peu partout, tentant d’entraîner avec eux les étudiants. Sans trop de succès au départ. Une fois le décret réécrit et vidé de sa substance, beaucoup de ces chercheurs sont sortis peu à peu du conflit. La plupart des universités ont alors retrouvé un certain calme.

Perturbations à plusieurs vitesses

C’est à peu près au même moment que la contestation a pris de l’ampleur chez les étudiants, sur d’autres motifs comme celui de la réforme de la formation des maîtres (lire ci-contre l’entretien avec William Marois), puis de l’abrogation de la loi LRU (autonomie des universités), votée il y a plus d’un an par le Parlement. Cette contestation étudiante s’est surtout concentrée dans les universités de lettres, langues et sciences humaines, celles qui ont bloqué le plus longtemps.

La reprise s’est faite par étapes et dans des conditions très diverses. Dans la région, on peut par exemple noter que La Rochelle est restée à l’écart de ce conflit, alors que Pau y est entrée la première assez durement, et que les quatre universités bordelaises ont rendu les armes de façon et à des moments différents (lire ci-dessous le cas de Bordeaux 3).

Une image un peu écornée

Que reste-t-il aujourd’hui de tout cela, au moment où des étudiants planchent encore sur leurs derniers examens ? « Un vrai gâchis », lâche Alain Boudou, président de Bordeaux 1 et du Pres ou université unique de Bordeaux, qui regroupe les quatre entités, soit près de 60 000 étudiants. « Ce mouvement a finalement surtout perturbé les plus fragiles, ceux qui sont en licence. L’image et l’attractivité des établissements vont certainement en pâtir. Dans beaucoup de familles, on va se dire qu’il vaut mieux envoyer ses enfants dans des IUT ou des écoles, surtout s’ils réussissent bien. »

Un gâchis aussi car ce conflit aurait pu, selon Alain Boudou, être évité si le « gouvernement n’avait pas commis toutes ces erreurs de communication ».

Des inscriptions en légère baisse

Quelles vont en être les conséquences très directes ? D’abord un taux d’échec probablement supérieur dans les deux premières années de licence. Particulièrement à Bordeaux 3, où de nombreux étudiants ont déserté l’université avant la fin du conflit. Il va ainsi falloir accueillir davantage de redoublants et les nouveaux entrants. Ces derniers seront-ils d’ailleurs moins nombreux à s’inscrire ? C’est une réalité à Rennes, la Sorbonne ou Montpellier avec des baisses de 20 % à 25 % des préinscriptions. En revanche, dans les universités de la région, cela n’a rien de flagrant. « Peut-être un peu. Mais franchement, cela semble marginal », souligne Alain Boudou. Ce dernier insiste plutôt sur l’attractivité des filières sélectives pour les bons élèves par rapport à l’université.

L’université a des atouts

L’université a pourtant beaucoup changé. Elle place très bien ses étudiants sur le marché de l’emploi au niveau master. Et l’accompagnement s’est amélioré en première année. Le site de Bordeaux va aussi bénéficier, comme 12 autres en France, d’une manne importante de l’État pour rénover des bâtiments en piteux état. Même si Pau et d’autres sont oubliés. Il reste enfin la fameuse autonomie. Bordeaux 1 et Bordeaux 2 vont bientôt basculer dans ce nouveau système, et Bordeaux 3 pourrait suivre. Critiquée par certains comme une privatisation rampante, approuvée par d’autres comme la chance de l’enseignement supérieur, elle permet essentiellement aux universités d’avoir des compétences élargies, particulièrement dans la gestion de leur budget. Mais aucune piste pour l’instant, selon Alain Boudou, sur une éventuelle augmentation des droits d’inscription. Au moins pour la prochaine rentrée.


Voir en ligne : http://www.sudouest.com/accueil/act...