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L’Etat embarrassé par sa jeunesse - Fabrice Tassel, Libération, 1er août 2009

dimanche 9 août 2009

Le silence assourdissant entourant la sortie du livre vert sur la jeunesse a, une nouvelle fois, prouvé que la France semble bien embarrassée par ses jeunes. Il a même fallu que Martin Hirsch, le haut commissaire à la Solidarité et à la Jeunesse, tape du poing sur la table, il y a deux semaines, pour que ce livre vert ait un peu d’écho, même si son manque de financement obère, pour l’heure, l’avenir de ce plan.

C’est ainsi, notre société vieillissante parle plus des jeunes lorsque les Beaux Gosses de Riad Sattouf cartonne ou lorsque les quartiers s’embrasent, plutôt que pour évoquer les solutions d’avenir. Contrat d’insertion professionnelle (CIP) en 1994, contrat première embauche (CPE) en 2006, réforme des lycées avortée en 2008, crise de l’université cette année, les rendez-vous manqués s’accumulent. Et le bilan du chômage s’alourdit : d’après les chiffres de l’office européen Eurostat du 23 juillet, le chômage des jeunes a augmenté plus vite au premier trimestre que pour l’ensemble de la population, touchant 5 millions d’entre eux.

« Découragement ». Comme à chaque fois en temps de crise, les jeunes trinquent les premiers, et plus brutalement que leurs aînés. Pour les 15-24 ans des 27 pays de l’Union européenne, le taux de chômage s’élève à 18,3 %. En France, 19,7 % des 18-24 ans sont chômeurs et 20,2 % d’entre eux vivent sous le seuil de pauvreté (contre 13 % dans l’ensemble de la population). Et à la rentrée, 650 000 jeunes diplômés vont débarquer sur un marché du travail en chute libre.

Du côté de l’Education nationale, le bilan ne semble pas plus brillant. Pas sur le plan quantitatif, le nombre de bacheliers et de hauts diplômés demeurant élevé (bien que nos grandes écoles et universités ne soient pas les mieux classées dans le monde, loin de là), mais sur la future société qu’elle dessine. Car le constat est largement partagé : l’écart entre les meilleurs et les plus mauvais s’accroît dangereusement, ancrant de plus en plus profondément l’image d’un ascenseur social bloqué. « Avec son obsession du classement, sa manie de trier les vainqueurs et les vaincus de la sélection scolaire, l’école produit très tôt du découragement », relève le sociologue Olivier Galland, l’un des plus critiques à l’égard de l’institution scolaire. Si les bons élèves, bien entourés socialement, tirent toujours leur épingle du jeu, les moins bons décrochent plus vite, et plus brutalement.

Autonomes. Mais alors, heureux ou pas, les jeunes ? Difficile de répondre, d’où l’intérêt des études comme celle dont nous publions les principaux aspects aujourd’hui. L’école et la famille semblent en recul - mais pas en voie de disparition - dans l’importance que les jeunes y accordent. Mais au premier rang des « musts » restent les potes… et le portable. Mais surtout, ces jeunes semblent beaucoup plus autonomes que ce qu’imaginent souvent les adultes, parents trop stressés. Et ce sont les jeunes qui fixent le baromètre de leur bonheur, pas leurs aînés. En mai, une étude réalisée par Ipsos pour la Fondation Wyeth montrait qu’alors que 80 % des adultes interrogés pensaient les jeunes mal dans leur peau, 70 % des jeunes se déclaraient satisfaits de leur vie et 74 % confiants dans leur capacité de réussir.


Voir en ligne : http://www.liberation.fr/societe/01...