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Suppressions de postes, réformes, grippe A : la rentrée chargée de Luc Chatel (Le Monde, 1er septembre 2009)

mardi 1er septembre 2009

Le pouls du pays bat au rythme de son école. Quelque 12 millions d’enfants et d’adolescents reprennent le chemin des classes et la France entière fait sa rentrée, mercredi 2 septembre.

Pour Luc Chatel, c’est le baptême du feu dans ses nouvelles fonctions de ministre de l’éducation. Mais le temps de l’éducation n’est pas le court terme. Une réforme engagée se met en place année après année et ne s’achève qu’une génération d’élèves plus tard.

Avec ses 825 000 enseignants du public et du privé, la machine éducation nationale est aussi lourde à démarrer qu’à freiner. Ce sont donc d’abord les mesures voulues par Xavier Darcos lorsqu’il était encore Rue de Grenelle que Luc Chatel va devoir gérer.

Dans l’immédiat, c’est une baisse de 13 500 postes qui donne le "la" de la rentrée. Alors que 16 000 autres suppressions sont déjà programmées pour septembre 2010. Cumulés depuis la rentrée 2006, ces non-remplacements de départs en retraite se traduisent par près de 50 000 suppressions, soit environ 6 % des effectifs.

Le taux d’encadrement ne change pas, assure pourtant M.Chatel, rappelant que l’essentiel des suppressions porte sur des postes qui n’étaient pas ou pas toujours "devant élèves" : remplaçants, enseignants détachés dans des organismes extérieurs…

Mais cela n’empêche pas les enseignants de trouver que l’on charge leur barque. L’idée de l’UMP selon laquelle il faut réduire les moyens de l’école pour l’obliger à se réformer ne trouve pas d’écho parmi eux.

Ce n’est pas, loin s’en faut, le seul sujet qui fâche. Les professeurs des écoles, en majorité hostiles aux réformes Darcos et déstabilisés par la désignation du primaire comme principale source des défaillances du système, couvent leur ressentiment. Au grand dam des syndicats, conscients des obligations liées au statut de fonctionnaire d’Etat, environ 2 800 "désobéisseurs" se vantent de ne pas appliquer ces réformes. Le ministre s’en indigne, mais oublie un peu vite qu’il y a quelques années son propre camp politique portait aux nues des "résistants" à la loi d’orientation Jospin de 1989.

Parmi les motivations de ces radicaux se trouve leur conviction – devenue banale en milieu enseignant –, que le gouvernement veut "casser" le service public d’éducation, en commençant par la maternelle.

M. Chatel semble avoir pris la mesure de cet état d’esprit, puisqu’il a annoncé, lundi 31 août, un "nouvel élan pour l’école maternelle", marqué notamment par l’adoption d’un "plan national de formation" conçu en concertation avec l’association générale des enseignants de cette école qui offre une préscolarisation à quasiment tous les enfants de 3 ans.

Le nouveau ministre va aussi devoir boucler la réforme de la formation des maîtres qui suscite de nombreuses contestations aussi bien dans l’enseignement scolaire qu’au sein d’une communauté universitaire très mobilisée au printemps dernier et dont les plaies sont encore à vif.

A son agenda de ces prochaines semaines figure l’élaboration du lycée de demain qui, conformément à l’engagement présidentiel, devra être mis en place à la rentrée 2010. Ce sujet, sur lequel Xavier Darcos avait trébuché en décembre 2008, est difficile à manier tant il inquiète les professeurs et déclenche d’imprévisibles réactions des lycéens.

L’absence de lettre de mission n’empêche pas le nouveau ministre de devoir aussi intégrer les nouvelles orientations élyséennes. Pour Luc Chatel, cela signifie se pencher de plus près sur les 120 000 jeunes qui sortent chaque année sans diplôme. Ces laissés-pour-compte qui étaient au cœur du discours de Versailles du président Sarkozy et que le système éducatif a beaucoup de mal à former.

Outre ces sujets de fond, déjà lourds, le risque de pandémie de grippe A(H1-N1) va occuper M. Chatel dans les jours et semaines à venir. Situation inédite et délicate où il ne doit en faire ni trop ni trop peu. Différentes dispositions en matière de prévention et, selon la gravité de la pandémie, de fermeture des établissements ont été prises. Des programmes de substitution sont prévus sur les ondes et par Internet.

Tout le reste est imprévisible et risque de placer l’école dans une position intenable : fermée, elle bloque le pays ; ouverte, elle devient un lieu idéal de propagation du virus.

Maryline Baumard et Luc Cédelle


Voir en ligne : Le Monde