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Un médaillé d’argent du Cnrs refuse sa prime - Sylvestre Huet, Sciences2, Libéblogs, 19 octobre 2009

mardi 20 octobre 2009

Didier Chatenay, médaillé d’argent du Cnrs en 1999 pour ses travaux en physique, vient d’écrire une lettre ouverte où il refuse toute prime liée à cette récompense.

Envoyée à Catherine Bréchignac et Arnold Migus, la lettre du physicien, au CV de très bonne facture, démarre ainsi : « J’ai appris récemment que vous alliez mettre en place une prime d’excellence scientifique (PES) destinée aux chercheurs du CNRS. Parmi les voies explorées pour la distribution de cette prime, vous songez à une attribution automatique aux médaillés du CNRS. Ayant eu l’honneur d’être distingué par mes pairs en recevant la Médaille d’Argent du CNRS en 1999, je vous fais part de mon refus a priori de me voir verser une telle prime si vous faites le choix de cette modalité... »

Ce matin, lors du colloque pour les 70 ans du Cnrs et avant la signature du contrat d’objectifs et de moyens pour 2009-2013 entre le Cnrs et l’Etat, Valérie Pécresse a réaffirmé sa volonté de mener une telle politique de primes. Lors de la discussion qui a suivi, une biologiste en fin de carrière a souligné que lors de son embauche, le salaire qu’on lui proposait était proche de « quatre fois le smic de l’époque. » Un chiffre d’autant plus remarquable que, comme le faisait remarquer Serge Haroche, médaille d’or du Cnrs en 2009, on recrutait très jeune, lui même fut recruté à 23 ans, avant d’avoir passé sa thèse. Aujourd’hui, le salaire d’embauche d’un chargé de recherche au Cnrs, souvent recruté après non seulement une thèse mais un post-doc et à un âge dépassant souvent la trentaine, tourne autour de 2200 euros brut, soit environ un smic et demie.

Cette échelle des salaires est assez significative. Pour le gouvernement actuel (et pas mal de ses prédécesseurs), entre le salaire d’un manoeuvre sur un chantier, ayant loupé son CAP de mécanique auto, et celui d’un scientifique sélectionné parmi les meilleurs après au moins un bac plus 8... il y a un demi SMIC d’écart.

Les discussions à la tribune et dans la salle ont éclairé le problème. Ainsi, le secrétaire général Alain Resplandy-Bernard, a évoqué une fin de carrière pour les directeurs de recherche similaire, au plan indiciaire, à celle « d’un général trois étoiles ». La comparaison peut sembler flatteuse. Le problème, c’est que je ne vois pas quel chercheur doit jouer le rôle des deuxièmes classes... En outre, il a parlé des primes comme de quelque chose de « marginal » relativement aux politiques de promotions. On comprend mal comment quelque chose qui est présenté de manière récurrente comme décisif par la ministre devient tout à coup marginal.

La lettre de Didier Chatenay est ici. On trouvera ici, une critique de la politique de prime.


Voir en ligne : http://sciences.blogs.liberation.fr...