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Au coeur du problème de la transmission - Laurence Giavarini, MCF à l’université de Bourgogne - "L’Humanité", 12 mars 2009

jeudi 12 mars 2009

Aujourd’hui, première AG des délégués de laboratoires (CNRS, INSERM, INRA…) à l’Institut océanographique de Paris. Elle va tenter de donner une forme spécifique, propre aux laboratoires précisément, à la mobilisation des chercheurs.

Le mouvement actuel laisse peu de place à une réflexion véritable sur ce qu’est la recherche, sur les différences d’approche et de statut de ceux, enseignants-chercheurs et chercheurs, qui font « de » la recherche. Il est vrai qu’elle est absente des discours ministériels, qu’elle ne saurait être comprise comme cet objet honteux que la hargne de Nicolas Sarkozy a vitupéré le 22 janvier. Il y a en France « des » recherches, comme il y a des lieux, et des statuts, pour la recherche. Être enseignant-chercheur à l’université, c’est organiser une part de son temps en vue de publier des articles, parfois un livre, sur des questions spécifiques ; c’est savoir qu’après une thèse il sera difficile de construire un objet de travail entièrement nouveau, si une délégation au CNRS ou une élection à l’Institut universitaire de France, synonymes de décharge partielle ou complète des cours et des tâches administratives, ne viennent soutenir cette élaboration.

C’est être aussi au coeur du problème de la transmission de la recherche : combien parmi nous peuvent faire cours sur l’objet de leurs travaux, en premier cycle (la licence) notamment ? Pas plus que la recherche ne se limite à la découverte de vérités intemporelles, pas plus qu’elle n’est la production d’un savoir univoque et consensuel, elle ne trouve en elle-même la forme naturelle de sa transmission.

Comment enseigner la connaissance comme processus et non pas seulement comme contenu de savoir ? La question se pose tout aussi bien aux enseignants du premier et du second degré. À l’université, elle nous confronte directement à notre implication disciplinaire dans la production de connaissances : être « littéraire », c’est, ou ce devrait être, travailler au coeur de la formation de la littérature comme champ et comme domaine de savoir ; être biologiste, c’est, ou ce devrait être, inscrire sa recherche dans une histoire des sciences de la vie. Et c’est parce qu’il y a des modèles différents de construction des savoirs, parce qu’en outre l’enseignement non plus que l’application industrielle ne sont la seule justification de la recherche qu’elle doit s’inscrire dans des structures différentes, qu’il faut par exemple un CNRS à côté des universités. C’est parce que l’organisation de la recherche est une question politique que nous devons revendiquer la pluralité des structures qui la définissent.