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"Université : la contestation s’invite à Sciences Po", par Nicolas Chapuis, "Libération", 17 mars 2009

mardi 17 mars 2009

REPORTAGE - Des étudiants et des professeurs des universités parisiennes ont envahi ce mardi les locaux de Sciences Po Paris, pour protester contre la réforme des universités et du statut d’enseignant chercheur.

Rue Saint-Guillaume, 17 heures ce mardi. Devant une entrée annexe de Sciences Po Paris, environ 200 étudiants et professeurs d’université se rassemblent. Une porte s’ouvre de l’intérieur, et tout le monde s’engoufre aux cris de « Dissolution des IEP ! », direction l’amphithéâtre Boutmy, où sont passés des générations d’étudiants.

Une petite altercation à l’entrée, quelques élèves de Sciences Po qui s’insurgent, mais globalement tout se passe dans le calme.

« L’opération s’est montée discrètement et on a été prévenus par le bouche à oreille », raconte Antoine, étudiant en L3 de science politique à Paris 8. « C’est notre première action et on veut que ça continue ».

Un étudiant de Paris 1 explique le programme : « Faire un cours alternatif sur les inégalités entre les universités ». Olivier Duhamel, qui devait faire cours, prend le micro et tente une médiation : « Je fais mon cours sur la Ve république, et en échange, les 20 dernières minutes sont consacrées au débat ».

Sa proposition rencontre un mur de protestation. Le temps pour lui de lancer : « Vous faites une confusion entre l’IEP et les grandes écoles ! » et sa voix disparait sous les cris et les quolibets. Il quitte l’amphi suivi par la majeure partie de ses élèves.

le symbole Sciences Po

Le cours alternatif n’aura pas lieu mais l’amphi bruisse de discussions. Ce sont en majorité des élèves mais quelques professeurs sont présents. Christine Cadot, maître de conférence en Science politique à Paris 8 explique ce geste fort : « L’idée est née d’une comparaison entre l’enseignement des sciences politiques à Paris 8 et à l’IEP. Les inégalités sonqt partout : dans l’administration, dans les modalité de recrutement, et dans les débouchés. »

« Sciences po, c’est surtout un symbole : celui de la ségrégation sociale et de l’établissement fermé », renchérit Karima Ramdani, doctorante à Paris 8 en science politique et chargé de cours.

Dialoguer

Ce que veulent tous les manifestants, c’est le dialogue. « il faut qu’on réussisse à se définir, reprend Antoine, à mettre les mots sur la mobilisation étudiante. On est aussi là pour dialoguer avec les élèves de Sciences po ».

Et eux, qu’en pensent-ils les élèves de l’IEP ? Pas que du bien à en croire les sifflets et la désertification massive de l’amphi. Certains sont restés, pour discuter. Arnaud Bontemps, élève en première année et membre de l’UNEF, s’explique avec les organisateurs du mouvement : « Je suis le premier ici à lutter contre la réforme, mais là c’est pas démocratique et c’est pas constructif. Vous êtes en train de braquer tous les étudiants d’ici plutôt que de les sensibiliser ». Un autre étudiante déplore le manque d’implication des élèves de l’Institut. « On est censé étudier la politique et il n’y a même pas débat sur la réforme ici ».

Mais l’humeur générale est à l’optimisme. l’opération a réussi et certains se verraient bien occuper les lieux plus longtemps. « Tant qu’on aura les profs avec nous ça ne retombera pas », explique Antoine, « il faut dissoudre les IEP dans le système général ». Arnaud Bontemps a une autre idée : « Plutôt que de ramener l’IEP au niveau des autres le mieux serait d’élever les universités au niveau de Sciences Po ».


Voir en ligne : Libération