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Communiqué du jury de Capes de Lettres classiques sur la masterisation (4 février 2010)

jeudi 4 février 2010, par Martin Rossignole

Sabine Luciani (PR de langue et littérature latines) et Eric Foulon (PR de langue et littérature grecques), vice-présidents du jury du Capes de Lettres Classiques font savoir que, dans le prolongement de la motion votée par ce jury en faveur de la défense du Capes de Lettres Classiques, ils ont refusé de communiquer au ministère de l’Education Nationale les sujets "zéro" de l’épreuve écrite de Langues anciennes. Fermement opposés à la réforme du Capes, ils n’ont pas jugé souhaitable de contribuer à la mise en œuvre des nouveaux programmes.

Vous trouverez ci-dessous

1. la motion votée en janvier 2010 par le jury du capes de Lettres Classiques et soutenue par la CNARELA et la 8ème section du CNU

2. La motion votée le 4 février par la 8ème section du CNU

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Motion pour la défense du CAPES de Lettres Classiques

Le jury du Capes externe de Lettres Classiques a pris connaissance :

- des propositions des 13 et 18 novembre 2009 des Ministères de l’Éducation Nationale et de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche sur la réforme des concours de recrutement des enseignants

- du projet de circulaire ministérielle « pour la mise en place des diplômes nationaux de master ouverts aux étudiants se destinant aux métiers de l’enseignement », publié le 8 décembre 2009 et remis aux organisations syndicales.

- de l’Arrêté du 28 décembre 2009 fixant les sections et les modalités d’organisation des concours du certificat d’aptitude au professorat du second degré, publié au Journal Officiel du 6 janvier 2010.

Fort de son expérience en matière de recrutement des Professeurs de Lycées et Collèges, il tient à exprimer ici son opposition ferme et motivée à cette réforme en insistant sur les aspects qui relèvent directement de sa compétence, à savoir :

1. Le passage de 3 à 2 épreuves d’admissibilité et d’admission signifie pour notre Capes pluridisciplinaire, qui associe langue et littérature françaises, langue et littérature latines ainsi que langue et littérature grecques, un préjudice considérable dans l’évaluation équitable de la triple compétence, en français et en langues anciennes, des futurs professeurs de collèges et lycées. Si la spécificité, la richesse et l’intérêt des études classiques résident précisément dans cette complémentarité historique entre le français, le latin et le grec, cette amputation du concours représente un appauvrissement culturel en opposition avec la volonté affichée « d’améliorer la qualification des personnels » éducatifs. C’est pourquoi le jury ne peut accepter de voir les deux épreuves actuelles de versions (latine et grecque) fondues en une seule épreuve « fourre-tout », dont personne ne peut raisonnablement prétendre qu’elle permettra de vérifier conjointement les aptitudes du candidat en version latine, en version grecque et en explication de texte latin ou grec. La solution adoptée pour maintenir le grec et le latin à l’écrit du concours étant à la fois peu sérieuse et d’une invraisemblable complication, le jury demande instamment, au nom de la sauvegarde des humanités, la restauration de trois épreuves écrites et de trois épreuves orales pour le Capes Externe de Lettres Classiques.

2. En ce qui concerne l’oral, la disparition de l’épreuve d’explication de texte latin ou grec, qui n’est nullement compensée par le commentaire, nécessairement réduit, intégré à l’une des épreuves écrites, est extrêmement dommageable à la formation des enseignants de lettres. Cet exercice, prioritairement oral, légué par la tradition humaniste remontant à l’Antiquité elle-même, reste pour un professeur le meilleur moyen d’éveiller l’intelligence et la sensibilité de ses élèves face aux textes. Il ne saurait y avoir d’enseignement littéraire digne de ce nom sans commentaire de texte. Dans la mesure où un concours de recrutement de professeurs ne peut se dispenser de vérifier leur aptitude scientifique dans toutes les matières qu’ils auront à enseigner, le jury demande la restauration de l’épreuve orale d’explication de texte en langue ancienne au Capes Externe de Lettres Classiques.

3. Le calendrier du concours annoncé le 13 novembre 2009 pose de multiples problèmes :

- En fixant au 1er décembre de l’année de M2 les épreuves d’admissibilité, il ne laisse guère plus de deux mois pour la préparation des candidats au programme du Capes. De plus, il n’est guère raisonnable de croire qu’un tel calendrier permettra aux étudiants de tenter leur chance au CRPE en septembre, aux Capes, CAPLP et CRCPE en novembre-décembre et à l’agrégation en avril. Les programmes des concours du premier et du second degré étant totalement différents, ils ne concernent pas les mêmes étudiants et, lorsque les candidats choisissent de préparer deux concours à la fois, il s’agit très naturellement du Capes et de l’Agrégation.

- Il est de plus impensable que les étudiants admissibles au Capes puissent, au cours du 2e semestre de M2, à la fois préparer des oraux, effectuer des stages et soutenir un véritable mémoire de recherche.

Le jury demande donc une révision du calendrier des épreuves qui permette de donner aux étudiants le temps nécessaire à la fois à une préparation sérieuse aux épreuves écrites et orales du Capes et à la rédaction d’un véritable mémoire de recherche.

4. De manière plus générale, le jury est frappé par le caractère démesuré des exigences auxquelles les nouveaux masters sont tenus de répondre, puisqu’ils doivent, conjointement préparer aux concours de recrutement (épreuves disciplinaires et nouvelles épreuves professionnelles), intégrer deux à trois stages d’enseignement, proposer une initiation à la recherche qui permette la poursuite d’études en doctorat, et enfin, préparer une réorientation professionnelle en cas d’échec au concours d’enseignement. En multipliant les objectifs de manière déraisonnable, un tel cahier des charges risque de porter atteinte non seulement aux compétences disciplinaires, mais à la professionnalisation des futurs enseignants.

Sans une évolution significative des quatre points évoqués, le concours deviendra incohérent et se trouvera en contradiction avec les objectifs qui lui ont été assignés. Il ne répondra plus aux exigences d’un concours d’État. Le jury du Capes externe de Lettres Classiques veut croire que ces préoccupations, qui rejoignent pleinement les objectifs d’amélioration de la formation fixés par les documents de cadrage, seront enfin prises en compte par les autorités compétentes. Les membres soussignés demandent avec insistance l’abrogation du décret qui définit les programmes du CAPES et l’ouverture d’une véritable discussion visant à permettre la tenue, dans les meilleures conditions possibles, de la session 2011.

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Motion de la 8e section du CNU

La 8e section partage entièrement les préoccupations et les demandes
exprimées dans la motion des membres du jury du Capes externe de Lettres
classiques. Elle apportera son soutien à toutes les initiatives qui seront
prises pour attirer l’attention sur les problèmes soulevés dans ce texte, et
prendre la défense de la qualité des concours.

En outre, la 8e section juge indispensable le rétablissement au Capes de
Lettres modernes des épreuves de langues ­ et notamment des langues
anciennes dans la mesure où il est absurde d’enseigner le français sans être
formé aux origines de cette langue.

Par ailleurs, la 8e section rappelle que la nouvelle définition des Masters
met en péril l’existence de Masters Recherche, seuls vrais viviers de
doctorants. La 8e section dit son attachement à ce que la différenciation
entre Masters Recherche et Masters Enseignement n’intervienne qu’en M2,
compte tenu du fait que les formations littéraires ont leurs spécificités,
et qu’il n’est dans l’intérêt d’aucune discipline que toutes soient ramenées
à un schéma unique.